Quêtant, Antoine François L'écolier devenu maître I LECOLIER DEVENU MAITRE. o u LE PEDANT JOUÉ^ COMÉDIE EN TROIS ACTES ET EN PROSE. Compoféc pour E s s A i du ridicule de caradere inventé par Molière , & introduit par Goldoni fur les Théâtres d'Italie. Repréfentée à Paris pour la premicre fois , le 6 Novembre. iy6y ,fur le Théâtre de la Barrière du Temple^ & à la, Foire S. Germain^ iy68. Prix, vingt-quatre fols. w A PARIS, Chez CaiLLEAU, Libraire , rue du Foin S. Jacques > vis-à-vis les Mathurins , à Saint-André. M DCC LXVIII. AVEC APPROBATION ET PRIVILÈGE DU ROI BS55 NOTA, \j A dlvifion de cette Pièce en trois grands Aftes , au tieude cinq, eft la même dont on fait communément ttfage en Italie pour toutes les Comédies en profe. Q^Bis INTRODUCTION JUSTIFICATIVE. JL E titre d'Effai que je donne à cet Ouvrage , eft moins un acte de modeftie , qu'une obligation dont je m'ac- quite en faveur de la vérité. Si je dois desremerciemens au public pour le fuceès de ma tentative , je dois humblement auffi lui -Tavoi!: gré de fon indulgence pour la témérité de mon entre- prife , & plus encore pour la façon dont je l'ai mife en exécution. Bien des perfonnes m'ont fuppofé des motifs de dépit i qui m'excuferoient peut-être ; mais qui n'ont jamais eu lieu. On a dit que le mauvais accueillait à ma Pièce , de certains côtés , m'avoit contraint de la proftituer ; je ne fais fi je me ferai des partifans , quand j'avouerai que ma Pièce a pafle de mon plein gré à fa deftination , fans s'ê- tre préfentée ailleurs. J'ignore fi l'on trouvera bon que je me glorifie de n'avoir épargné ni l'attention , ni les foins, pour rendre cet Ouvrage agréable dans un lieu que le préjugé ne favorife pas ; je doute même fiTon me pardonnera d'avoir penfé que le Public, afTemblé dansurt Théâtre du Marais, ne jugeroit pas moins équitable-» ment que dans les Speôacles de la Ville ; mais en lup- pofantque la réufTite fafTe écouter mes raifons. Je de- vine qu'on me chicanera toujours fur la fmgularité dû mon choix ; & c'efl fur cet article que je veux tâcher de me juflifîer. Un inftinft naturel & les circonftances m'orvt engagé- dans la carrière dramatique ; le fuceès de différens Opé- ra Comiques, ne m'a pas empêché d'appereevoir corn-- bien ce genre d'ouvrage efl peu méritoire aux yeux à\x ^[XQÏiç. y quoiqu'il foit très-difficile & très-fuivi iv^ INTRODUCTION J'ai entendu , dès mon enfance , parler de Molière comme les vieilles gens parlent du tems pafTé. Je m'eton- nois qu'on donnât tant de louanges & de regrets à ce peintre de la Nature , & que fi peu de perfonnes travail- laffent à l'imiter. Pendant un affez long féjour que je fis en Italie , je vis repA-éfenter les Comédies du nouveau genre , établi par Goldoni ; j'appris que cet Auteur , déjà fameux, avoit trouvé le Théâtre de fon pays dans l'é- tat de groffiereté, d'où Molière avoit tiré le nôtre; & j'obfervai que ce rare génie avoit acquit fa réputation par les mêmes moyens qui rendent chez nous fon prédé- ceffeur fi célèbre. Je crus appercevoir que l'étude des ridicules étoit la fource- de fon art , & que la gaïté mo- rale de (qs Ouvrages en faifoit la réputation & le fuccès. Ce fut alors c;ue j'entrevis une différence marquée entre les Fourberies de Scapin d>C les Femmes Scayantes , en- tre le François à Londres & les trois Confines , & je dé- mêlai pourquoi la Métromanie plaifoit plus décidément & plus généralement au Public connoiffeur que la tendre Cénie ; j'attribuai la raifon de cette différence à l'amu- fement ôc l'utilité réunis dans les plus accréditées de ces Pièces, & féparés dans les autres que je leur compa- rois;, j'effayai de remonter au principe de cet affem- blage (i néceffiûre , & je m'accoutumai à penfer que ce principe exiftoit uniquement dans le choix des ridicules les plus frappans ; & que leur repréfentation naïve , pro- duifoit à la fois fans aucune contrainte , le plaifirô^ l'inf- trudion du Spedateur , la réputation de l'Ouvrage ÔC la gloire de l'Auteur. Des obfervations réitérées me confirmèrent dans ce préjugé ;j'admirois cependant avec vénération les Drames larmoyans , Ouvrage d'une in- vention fi merveilleufe , que le François ne fait encore où leur touver un nom ; mais je jugeois,d'après mon pré- jugé, que ce n'étoit point des Comédies, parce que le ridicule y m.anquoit , je trouvois même que la moralité de ces Poëmes fe devinoit malaifément , au lieu qu'elle fe prcfcnte d'elle même dans les Comédies de Molière, JUSTIFICATIVE, V & dans celle de Goldoni ; il me fembloît aiiffi que \qs peribnnages de ces Poèmes modernes étoient fouvent, ou trop précieux, ou trop emphatiques, & que leurs difcours s'éloignoient du ton fimple de la nature , à force de vouloir s'y conformer; cette obfervation dé- pend peut-être chez moi d'un vice de caraftere ; j'ai le défaut de paroître férieux & d'être un peu bouffon , j'aime à rire , & je préfère la morale qui dilate l'efprit à celle qui le reflerre ; il me femble que le cœur s'ouvre plus volontiers à la joie qu'à la trifîeffe , & que l'efprit ne réiîfte plus gueres quand le cœur efl: gagné. L'objet de la Comédie étant d'inftruire en faifant rire , ceft par cette raifon que j'ai choifi, à l'imitation du premier de mes maîtres , un fujet & des cara6^eres purement ridi- cules. Le travers que j'ai entrepris de jouer eft un des plus communs dans la fociété. L'éducation décide de nous pour toute la vie : il femble que les parens de- vroient y donner les foins les plus affidus ; mais d'heu- reufes difpofit'.ons deviennent fouvent inutiles, par la né- gligence qu'on met à les cultiver , & quelquefois aufîi par l'ignorance & la mauvaife conduite de ceux aux- quels on s'en rapporte. Une femme fans éducation , de refpece de Madame Guillaume, n'acquiert point de lu- mières en acquérant des richefîes ; elle n'y gagne que des airs d'autant plus ridicules , qu'il convient moins à ces exprefîions & à fes manières : une femme de ce ca- radere croit avoir tout fait quand elle a mis un Précep- teur auprès de fo fils. Pourvu que M. l'Abbé ne quitte pas Monfieur fon élevé , & qu'il faffe àts avanies de tems en tems , on ne s'inqniete point fi l'efprit du jeune hem: ie eft orné , fi {qs mœurs fe forment , il fuffit qu'il ait un "" récepteur à fes trouffes pendant plufieurs années ; qu'au bout du tems il foit un for , peu importe , Mon- fieur fera riche, c'eft tout ce qu'il lui faut. Les confc- quences dangereufes de cette impertinente morale ont frappé mon efprit, c'eft là-defius que j'ai fondé toute ma Pièce; j'ai pris mes caraderes principaux & leurs Vr TNT RO D 1/ CT 10 ]^ contraftes dans plufieurs fociciés ; les incidens même font copiés d'aprè • la nature , j'ai pris le foin le plus particulier de la confiilter en tout , & j'ai lieu de m'en applaudir. J'ai vu plufieurs de mes originaux fe divertir beaucoup de leur copie , & c'étoit le luccès le plus flat- teur que je pouvois attendre , même fur le premier de nos Théâtres ; mais û le fuccès m'engage à révéler au- jourd'hui le fecret de mon entreprife , la crainte de l'é- vénement m'a rendu plus timide au moment de l'exé- cuter ; j'ai craint les préjugés des Comédiens, qui par trop de délicateffe , raientifient fouvent l'ardeur d'un Auteur en tronquant fon Ouvrage ; d'un autre côté , j'ai craint le Public. Toute la France évoque aujourd'hui l'efprit de Molière ; mais fi Molière répondoit fur fon ton d'autre fois , ce pourroit bien être à la honte de fon ombre; non feulement on ne lui pardonneroit pas les tâtons de la nourrice , la matière louable cTun malade ^ les puces qui inquiètent A^nh^ pendant la nuit; mais peut- être fe déchaîneroit-on auffi contre les répétitions fré- quentes de qiHalloit il faire dans cette galère ': que favons- nous fi l'on épargneroit même Us beaux yeux de ma caf- fette ; car le fliîe élégant des Comédies a civilifé nos oreilles jufqu'à tel point , quelles s'ofFenfent aujourd'hui de la naïveté la plus vraie , comme d'une platitude. Il faut de l'épigramme partout,& l'épigramme efl le fléau du génie dans les Ouvrages de longue haleine. Le caractère de Madame Guillaume a fait au Théâtre tout l'effet que j'en attendois; il efl vrai que l'A clrice qui la repréfente, s'en acquite de manière à faire excufer bien des défauts de l'Auteur; mais c'efl , je crois , le rôle qu'on auroit le plus attaqué parmi les Comédiens ; j'aurois ôté volon- tiers les cérémonies plates comme Vépée de Charlemagne , Sc deux ou trois autres proverbes que des gens de goût ont trouvé un peu trop bas à la repréfentation ; mais j'au- rois tenu ferme pour le refle , par l'idée que je me fuis faite de l'exceilence du ton de Madame Jourdain, & du bon eiTet de fes façons de parler communes & prover- justificative: v? Lîaks. J'aurois crû altérer le caraftere de Madame Guillaume en la rendant plus polie ; & l'affeftation pré- cieufe de l'autre Boufgeoife, bien loin de faire effet,' n'auroit pas même été fentie. J'ofe donc me favoir gré d'avoir fuivi en cela mon opinion ; je faifis cette occa- iionpour remercier mes Afteurs de leur complaifance à mon égard, & les complimenter de la furprife agréable qu'ils ont cau(ée au Public , peu prévenu jufqu'aiors en faveur de leur capacité ; fi quelqu'un d'eux fait moins bien que Je ne ledefirerois , je m'en prens à l'obûination bien moins qu'à l'habitude. Je fouhaite que l'impreffion de cet Ouvrage foit aufli favorablenient reçue que la repréfentation. J'ai tâché d'accorder la plaifanterie avec les bonnes mœurs, & je n'aurois jamais écrit, fi j'euffe cru cet accord impolîible ; je ne me plaindrai point Ci j'amufe , mais je ferai traniporté de joie & je chérirai mon travail , s'il a le bonheur de paroître utile. , A P P R O B A T I O N. J A I lii par ordre de Monfeigneur le Vice- Chancelier j f Ecolier devenu Maître , ou le Pédant joué , Comédie eo trois Ades, à Paris, ce n O^obre J767. ^ ^ .,„,. MARIN; PRIFILEGEDU ROI. \^0 U I s , PAR lA GRACE DE DiEU , Rol DB FrANCE ET DE NaVARRE * A nos amés & féaux Confeillers, les Gens tenans nos Cours Ae Parle- ment, Maîtres des Requêtes ordiuaires de notre Hôtel, Grand Con- feil. Prévôt de Paris , Baillifs , Sénéchaux , leurs Lieutenans Civils, & autres nos Jufticiers qu'il appartiendra : Salut. Notre amé, André- Charles Cauleau , Libraire Nous a fait expofer qu'il defireroit faije imprimer , 5c donnçx aa Public; /« (Surres dt ThêAtre de M. Q^" !*#« iB^Il Nous plaîfoit lui accorder nos Lettres <îe Permifïîon pour ce n& ceffaires. A ces Causes , voulant favorablement traiter l'Expofant ^ Nous lui avons permis & permettons par ces Pré(entes , de faire im- primer ledit Ouvrage autant de fois que bon lui (èmblera , & de le vendre ,& débite.r par tout notre Royaume pendant le tems de trois années confécutives, à compter du jour delà date des P ré fentes : Faifons défenfes à tous Imprimeurs, Libraires & autres perfonnes de quelque qualité & condition qu'elles foient, d'en introduire d'impref- fion étrangère dans aucun lieu de notre obéiflance , A la charge que ces préientes feront enregiftrées tout au long fur le Regiftre de la Communauté des Imprimeurs Se Libraires de Paris, dans trois mois de la date d'icelles: Que l'imprertion dudit Ouvrage fera faite dans noue Royaume & non ailleurs , en bon papier, & beaux caraftères ; que l'impétrant fe conformera en tout aux Réglemens de la Librairie, & notamment à celui du lo Avril 1715 , a peine de déchéance de la préfente Pe- milfion ; qu'avant de l'expofer en vente , le Manufcrit qui aura fervi de copie à l'impreffion dudit Ouvrage , fera remis dans le même état où l'Approbation y aura été donnée, es mains de notre très» cher & féal^hevalier , Chancelier de France , le SieuroE Lamoignon , gi qu'il en fera enfuitc remis deux Exemplaires dans notie Bi-biiotlie- que publique , un dans celle de notre Château du Louvre un dans celle dudit fîeur deLamoignon, & un dans celle de notre très- cher & féal Chevalier, Vice- Chancelier, & Garde des Sce-iux de ïrance le Sieur de MaujeoU : Ictont à peine de nullité des P»éfentes : Du contenu defquelles vouj mandons & civjoignons de faire jouit ledit Expofant & fes ayants-caufcs , pleinement & paifibiement . fan« fouffrir qu'il leur foit fait aucun trouble ou empéchcmnt VoutoN» qu'à la copie des Préfentes , qui fera imprimée tout au long , au com- kiienccment ou à la fin dudit Ouvrage , foi foit ajoutée comme à l'original. Commandons au premier notre Huiflier ou Sergent , fur ce requis , de faire , pour l'exécution d'icelles , tous Aftes requis & né-, ceffaires , fans demander autre permirtion, & nonobftint clameur de Haro , Charte Normande, & Lettres à ce contraires. Car tel efl notre 'plaifir. Donne à Paris le fciziéme jour du mois de Décembre , l'an mil fept cent foixame-fept , & de notre régné le ciaquaDtc-troi/îemc. Par le Roicnfon Coafeil. - - LE BEGUE. Regijlré, fur le ReglflreXVlL de U Chambre Royale & Syndicale des Libraires & Imprimeurs de Paris. N^. 1700 3 folio 343 , conformé^ .ment au Règlement de i72i»AParisce 8 Janvier 1768. GxNEAt;, Syndic. t'ECOLIER 1^^ L'ÉCOLIER DEVENU MAITRE, LE PÉDANT J O U El FARCE COMIQUE, '£N TROIS ACTES ET EN PROSE; PERSONNAGES. J U L I E 5 fille de Madame Bertrand , amoureufe de Vaîere. V A L E R E 9 jeune Officier , amoureux de Julie. Ivl. me BERTRAND, Procureufe & jeune veuve retirée dans fa Terre, M."*" GUILLAUME, Eourgeoife opulente ^ mère de M. Fan- fan. M. E A N F A H-j J^Hs de Madame Guillaume. M. T U L L I Û S , Précepteur de M. Fanfan. LA FRANCE, Valet de Valere , demeurant che[ Madame Ber- ^^ trand , déguifé en femme de chambre foui le \ '-^ nom de Fouktte , 6» aimée de Tullirts. ï A C QXJ E L I N E , femme de chambre de Madame Guillaume ^ d \S arnouréufideLaFrante, I-a Scmi ejl à la campagne , dans une falU de la maU fou de Madame Biftrands L' É C O L I E R DEVENU MAITRE, ou Z£ PÉDANT JOUÉ, FARCE COMIQUE. Hli tmtfmiXiMMULiiumLiim. A m iiiiiiii i iibi h ium ACTE PREMIER. SCENE PREMIERE. JUUE , JACQUELINE , tenant un paquet 6* tme Lettre» J U L I £ > 4Vff impatience. A I s S E x.-moi , Jacqueline, encore un coup ■■, laifîèz-moi » je ne veux rien accepter de M. Fdnfan^bî de madame Guil- laume; tenex-voMS pour dit , qu'ils m'ennuient vous deux au de-là de l'imagination , & que j'aimcrois mieux fuir à cent lieues, que d'être jamais la belle-fîlle de Madame Guillaume. J A C Q^U E L I N E. Si vous ne voulez point des rubans, lifcz au moins les vers latins que M. Fanfan vous envoie. JULIE. . Qu'il garde fes vers latins , & dites-lui dç ma part, en bon françois, qu'il me lalife tranquille, 6c qu'il ciierchc fortune ailleurs. Aij â| V È c o L 1 E r; JACQUELINE. Vous avez raifon, Mademoifelle, je fuis cie votre avis f ainfi lie vous contraignez pas avec moi ; iî vous n'armez pas jnes maîtres , je ne les chéris gueres. Je ne fuis pas mcdifante, mais en qualité de bonne domellique, je publie leurs défauts avec un plaifîr incroyable. La mère eft une greffe Marchande de foin, qui méritcroit d'en manger*, bavarde , arrogance , fans éducation , parlant grofïierement , agiflant de même -, le fils eft un vrai commencement 'd'idiot que fon Précepteur achevé: enfin , cela n'a d'autre mérite que la richefle , & je conviens qu une demoifellc comme vous, n'cft pas faite pour une al- liance lêmblable -, tranchons le mot , tenez , je puis vous être utile, ouvrez-moi votre cœur, Mademoifelle, je fais déjà une partie de vos fecrets. ■ JULIE. Et que favez-vous , s'il vous plaît ? Que voulez- vous dire ? JACQUELINE. D'abord qu'il y a par le monde un certain M. Valere , fort aimable Cavalier , employé au fervice , ifTu de Procureur comme vous, &c que je foupçonne de ne pas vous être in- diiFéient; n'ai-je pas deviné jufte? JULIE. Défiez- voifs de votre pcnétr-ation , elle m'ofFenfe j & vous, abufe. JACQUELINE. Vous me le dites d'un ton qui m'encourage , en vérité, à la croire infiiillible , mais pouriliivons i ce M. Valere avoir un domeftique, nommé la France, fort brave gardon, qui me faifoit la cour , &c que j'aurois déjà époufé, fans une afïàire dans laquelle il efi: intétéfle pour le fervice de ion maître. Ne connoiflez-vous pas ce la France, Mademoifelle? JULIE. Et d'où voulez-vous que je le connoifTe -, quelle autre que vous , auroit eu la hardiefle de venir m'en parler ? •JACQUELINE. Excufez, Mademoifelle, je penfois que Poulette auroit pfrvous en donner des nouvelles. ]ULIE. Poulette , dites- vous ? JACQUELINE. Mais oui. Poulette , la femme de charge de ce Château , cft-cc que vous ne la connoifRz pas non plus ? J U L 1 E , à part. Scrolt-clle inflruite, ou veut-elle m'embarralîcr ? Tenez> Jacqueline , finillons cet entretien. FARCE COMiqUE, jf J A C Q.U E L 1 N L. Eh ! mort de ma vie , Mademoifelle , finifTez vous-même de m'impatier.ter, & ne perdez pas de bons amis par une difîimuiarion inutile. Puifqu'il iliut vous parler ncr , la France eti ici pour les intérêts de vo'ire amant j il s\it introduit auprès de Madame votre mère , qu'il fert en qualité de femme de charge , fous le nom de Poulette. Voilà ce que vous favez. La France a déjà p;agnè fur madame votre miCre de retarder le mariage projette entre vous & M. Fanfan , ôc nous nous entendons tous deux pour vous faire époufer votre amant ; voilà ce que vous ne lavez pas , Se que j'aurois du vous cacher pour vous punir de votre difcrétion- Trouvez- vous à prcfent que je lois bonne à quelque chofe î JULIE. Ah ! ma chère Jacqueline , je vous demande pardon j par- lez plus bas j ma chère amie , gardez-moi le fecret. JACQU ELINE. Votre chère amie : c'eft M. Valere qui me vaut cette dou- ceur-là. JULIE. Prens garde furtout ^^e rien laifler foupçonner àma mère, JACQUELINE. Oh I ne craignez rien , nous connoilTons auflî Ton carac- tère-, c'eft une dame à beaux fentimcns, qui fe pique de pé- nétration & de beaucoup d'ufage. La France a profité dfc Ton foible , pour rindifpofer contre^ ma maîtrefTe , 8c je ne doute pas qu'il ne les conduife à une rupture ouverte , fi M. Valere n'arrive pas inceflammcnt comme il nous l'a fait ef- pércr. JULIE. Quoi, Valere doit venir ici 1 JACQUELINE. Il arrivera peut être aujourd'hui. JULIE. Seroit il polTible , auiourd'bui ? JACQUELINE. Oui vraiment , peut être tout à l'heure. JULIE. Ah îma chère , fi tu dis vrai , je fuis au comble de la joic> cmbralic moi pour cette bonne nouvelle. JACQUELINE. Voici votre mère. JULIE. Ne dis rien. JACQUELINE. N'ayez pas peur. A iij V È C 0 L I E R: «■onKearBMm SCENE IL JULIE, JACQUELINE, M.'^<= BERTRAN/D. M.'"^ B E R T R A N D , d'un ton compofé. w u E veulent dire ces tranfporrs , ma fille? ^ }Ulie. Rien 5 ma mère. M.-^^ BERTRAND. Paffcz de cz côte , Jacqueline , & qu'il ne vous arrive plus d'eux auffi familière avec ma fille \ fi vorre maîtrene n'a pas afïcz d'ulage pour fe faire refpecler, fâchez que je ne lui refTemb-le pas. Qiicl croit le fujct dé votre colloque? JACQUELINE. 3'apporîois un nœud de rubans à MademoifcUe de la part de ma maîtrefîe. M.'^e BERTRAND. Il felloit vous en tenir à votre commifïion -, qu'avez-vous fait de ces rubans, ma fille, où font-ils ? JACQUELINE. Madctnoirelle n'en aime pas la couleur. Madame, elle nip les a rendus. M.n^« BERTRAND. Ce n'cfi: point vous que je quefîionne; unedomeftique doit attendre qu'on l'interroge , de fe tenir daiis la rcferve la plus refpedlueufe quand on ne lui parle pas. Et vous, Mademoi- fellc, pourquoi faire une impolircfre à une femme que je reçois à ma Terre 5'cigneuriaie', Q^ueilc idée vouiez- vous qu'on prenne de mon favoir vivre î II peut fe faire que ce prcfcnt foit fort commun ; n'impoirc , vous deviez le rece- voir : en force les gens aux égards par les procédés hcunêtes qu'on a pour eux. JACQUELINE, à pan. Article important pour la civiiitc puérile. M.™<= BERTRAND. Qué'di'Scs-voifs encore ' JACQUELINE. Te ra*c;:horte à la réfervc -. Madame. iM."'= BERTR AND. Il faut vous cxhorfer rôut bas. Donnez moi ces rubans. J ACQUhLlNE. \.cs voilvà. FARCE COMIQVE, # M."^<= BERTRAND. Quel eft ce papier , s'adrefle-t-il à Julie î JACQUELINE. Oui, Madame 5 ce font des vers latins de M- Fanfan. y M."^'^ BERTRAND. Donnez donc , pourquoi ne m'en parliez-vous pas 3 JACQUELINE. C'eft qu'ils ne valent fûrement rien. >^"- BERTRAND. Et qui vous l'a diti cil-ce que vous entendez le latin? ' JACQUELINE. Non, Madame. M.'"^ BERTRAND. Pourquoi décidez vous donc fans connoiiTance ? Voyons ces versi {elle ouvre le papier.) Vous direz à madame Guil- laume, que ma fille eft très- contente de fou préfent. JULIE. Mais cela n'eft pas vrai , ma mcre. M."^- BERTRAND. Taifez-vous, ma fille , vous direz auffi à M. Fanfan que ;e trouve Tes vers très-jolis. JULIE. Eft-ce que vous entendez le latin , ma mère ? M. "'^ BERTRAND. Votre réflexion eft impertinente, Mademoifelleiajlez , Jacqueline i dites ce que je vous recommande à Madame Guillaume , & que je l'attendrai ici dans un quart d'heure pour déjeuner. JACQUELINE. Oui , Madame. ( elle s'en va. ) M.""« B E R T R A N D. r arrêtant. Dites aufli à Poulette ciu'cUc tienne le cafFé prêt. JACQUELINE. Oui, madame, {elle veut s'en aller.) M.n^^ BERTRAND. Ecoutez , vous prierez M. TuUius de pafTer ici feul tout à l'heure , li cela lui eft pofîible. JACQUELINE. Oui, Madame. M.'««> BERTRAND. Allez , mon enfant. JACQUELINE. Madame n'oublie-t-elle pas quelque cômmifîîon î M.n^<=BERTR AND. Non, faites ieukmcK celles dvjnt je vousrti chargé. A iv f r È C O LI E R, ^ J A C QJJ E L I N E , à part. C'efl bien a/Tez d'oavrag:. Elle fort. SCENE III. M.'^^= BERTRAND, JULIE. M.'"^ BERTRAND. l!^ a V ez-vous, Julic,quc vous êtes d'un neuf étonnant , vous ne vous formez points vous m'interrompez, vous me dé- mentez. JULIE. C'eflque je fuis franche, ma mère, vous faites des com- plimens pour des chofcs qui n'en valent pas la peine , & que vous n'avez feulement pas rci^ardées. M.n^«= BERTRAND. Apprenez que je ne fais rien fans raifon , & que i'ufage des gens de dillin.lion , eft de cacher leurs fentimens fous à que je n'aime point \ts Tots , &: vous avez trop d'efprit pour ne pas convenir que ce M. Fanfan eft d'une ftupidité ridicule. M.'"c BERTRAND. Point du tout. C'efl: un fruit rardif, que je crois dt bon acabit, 5c qui promet beaucoup de fa maturité. tft:-ce que votre père n'étoit pas tout de meraeî' . JULIE. Juflemcnt , ma mère , il étoit tout femblable •, auffi n'a t-il point change ,'&' vous lui reprochiez encore un mois avanc fa mort qu'il étoit un imbécile. M.'^^ BERTRAND. C'étoit une fxron de parler familière entre nous, à la- quelle vous n'auriez pas dû faire attention j au reftc fâchez que votre p.:re avoir des qualités cachées , mais précieufes , éc qui v.Vient bien, pour une femme , tout le brillant d'une jma'^iination vive, ik d'an cfprit orné ; vous apprendrez cela quelque jour> ma fille. FARCE COMIQUE, ^ JULIE. Ce ne fera pas M. Fanfan toujours. M.'"^ BERTRAND. Vous aimeriez mieux Valcre , n'ed-ce pas ? JULIE. Oh ! oui, ma mcre. M.'"= BERTRAND. Je vous ai défendu d'y ibnger. J U L I E. Il m'eft impoffible de vous obéir. M.'"^ BERTRAND. Ec pourquoi donc, s'il vous plaît? JULIE. C'cft que je ne pourrai jamais me réfourîre à devenir la femme d'un homme qui n'a pas fini Tes premières claflesà plus de vingt ans, & qu'un Précepteur menace tous les jours des étrivieres. M."^e S£i^TRAND. Taifcz-vous, Mademoirelle , vos obfti nations fîniroient par me déplaire. Allez achever votre toiiccte. iiiiiiiiiiMi imiiifliiii iimiu ,i iUtuuii. .i jiiimii SCENE IV. M.'"' BERTRAND ;1W^. J A I bcfoin de toute ma prudence avec cet enBnt-Ià. Je votidrois que Ton mariaffe avec M. Fanfan put fe terminer , & jai des idées contraires qui me font prcfque dclircr qu'il ne fe décide poinr. Les fcntiniens du jeune homme m'inté- reflent & m'inquiètent; mais j'appcrçois le Prcccptcur. I— ■■■« ■ IIIEMBH—I ^— — I I '" Il I Mil ■MI.B.LWXW.I I ■■ 1 1 11 JCIMWVIA»!» J ■HIIIHBBBM^ SCENE V. M. TULLIUS, M."^ BERTRAND. M."'' BERTRAND. Approchez, M. Tullius , je vous attendois avec im- patience. TULLIUS. Je me fuis emprcfîe d'accourir avec vclocitc. Madame , pour favnir en quoi mon zè!e refpeclueux peut avoir le bonheur d'être utile au (Service de Madame. M. "^^ BERTRAND. AfT.ycz-vouSjM. TuUius. 19 V Ê CO LI E R, T U L L I U S , faifant des révérences:. Madame. M.^'BERTRAND. AfTeyez-vous donc , je vous prie. TULLI US. Madame, le refpect que j'ai pour Madame M."^^ BERTRAND. Faites -moi donc la grâce de vous afleoir , car vous m'o- bligeriez à me tenir debout. T U L L l U S , s'tfeyant. Ah 1 Madame , tant s'en faut que je le permette. M.«'<= BERTRAND. Eft-ce que les cérémonies & la timidité conviennent à un homme de votre mérite ? Rendez- vous plus de jufliice. TULLI US. La Sageife fe dé/îe de fbi-même , Madame -, d'ailleurs la gravité de mon miniilere , de la circonfpedion de mes prin- cipes M."^' BERTRAND. Laifïbns-là votre miniftcre & vos principes. Monfieur Tiil- liu|a vous ne parlez point à une écoliere. T U L L I U S. Tant s'en faut que je le croi Madame -, des attraits auflî beaux que les vôtres commandent à la férule , 5c n'y font point fournis. M.^e BERTRAND. C'efl: une galanterie que je vous arrache , mais elle eft dé- placée. Quand on efl veuve à trente-trois ans , avec une fille de dix-fept, on n'efl: plus jeune, Monfieur Tullius. T U L L I U S. Qn ed mienx , Madame :1a vie hum.aine eft comparée par divers Philofophcs , à un fcftin -, & dans tous les repas , Madame , vous favez que le moment le plus délicieux n'eft pas aux premiers ferviccs , c'eft entre la poire ôc le fromage. M.-^-BER.TRAND. Vous avez de l'efprit, Monfieur Tullius, & je vous fais gré de vos Iionnêtctés ; mais il ne s'agit point de cela. J'ai , ■comme vous favez, beaucoup de considération pour Madame Guillaume, de de l'amitié pour fon fils; dites-moi franche- ment ce que vous pcnfez de ce jeune homme? TULLIUS. • C'cft un méchant fu jet. Madame, je l'ai vu docile pen- dant neuf années; mais depuis foa féjour chez vous, je ne le reconnois plus. " FARCE COMKIUE, n M «"« B E R T R A N D. Vous m'étonnez, je lui trouve l'air doux cependant; il ^'ofc parler , la moindre chofe Tintimide. TULLIUS. Vous vous trompez. Madame, fa douceur n'eftque lîmu- lécj le falpctre & la poudre ont moins d'acfhivitc oue fa cervelle Hier il jetra Ton livre par terre en ma prcfence: ce matin , j'ai eu toutes les peines du monde à lui faire écrire les vers pour Mademoifelle Julie , & ce foir je ticniis dans l'attente des excès nouveaux où fon humeur rétive pourra remporter. M.™^BERTRAND. Je ne vois pas que ces prétendus excès foient de Ç\ grande conréquence; cependant, dires-moi , à quoi vous attribuez ces diftradtions? TULLIUS. Jen'ofevous l'avouer. M '"<= B E R T R A N D. Seroit-cc par hazard quelque pnilion ? TULLIUS. Hélas! Madame, j'ai lieu de le croire', devois-je attcncîrc que les yeux de Tullius Teroicnt témoins dnmc pareille li- cence ; moi qui n'ai jamais cefle , par mes leçons Se par mes exemples , moi , dis-je , qui n'ai jamais ccfle d'infpirer à ce petit coquin l'averiîon la plus cxad:e pour les femmes & l'a- mour. M."'« BERTRAND. Vous avez ou tore , Monfieur Tullius, il y a un milieu dans tout : v.r\ jeune homme de vingt ans doit être inîlruit diifércmmcnt ; d'ailleurs vous favez que votre difciplc doit èpoufer ma iîllc. TULLIUS. ^ Ce n'cR pns Mademoifelle Julie qui le trouble, & j'i- gnore julqu'à préfent quel cfl: l'objet qui produit fcs verti- iics ; mais je le découvrirai. Madame, afTurèment , & j'ai déjà des foupçons. M.»"" BERTRAND. Et fur qui ? TULLIUS. Je vous ofFenferois pcut-ctic en nommant quelqu'un de votre maifon. M. «-'^«^ BERTRAND. Et pourquoi ? fi ces fentimens Ibnc venus d'eux-mêmes, 5i iî pcrfonne ne les entretient. TULLIUS. llcft vrai, Madam.e, que Mademoifelle Poulette n'a pa; Il L écolier; encore paru y faire attention; c'efl une fille d'une vercti , d'un mérite lî rare , d'une retenue fi exemplaire. Mais je ne lui pafTerai point cela, Mfidame *, (\ le petit coquin a jette fes vues de ce côté-là , je vous reponds que Ton audace fera ri- •gourcufcmenr punie , je vous en reponds. M."= BERTRAND. Il me paroît que vous prenez à cela un intérêt bien vif. T U L L I U S. C'efl: le zèle de mon miniftcre. Madame; fi le crime ett avéré , il faut que juftice fbit faite, cajligabitur, {[ fera puni , &c je lui apprendrai qu'un Ecolier ne doit jamais devenir amoureux fans la permiilîon de fon Précepteur. M."^<= BERTRAND. Ecoutez , Monficur Tullius , vous n'êtes point fur encore; le jeune homme aime peut-être quelqu'un qui lui convient mieux que Poulette. TULLIUS. Je le fouhaite. Madame, &c en ce cas, je verrrai à mo- dérer mon reiTcntiment ; mais fi c'efl: ce que je penfe Pardonnez, Madame, j'apperçois la {èduifante enchante- re/fe, permettez que je me retire. M "^= BERTRAND. Quoi , vous craignez aulïi les charmes de ma femme de charge? venez, Poulette, &: rafifurez M. Tullius, il a peur que vous ne le rendiez amoureux. SCENE V L POULETTE, M.- BERTRAND, TULLIUS. POULETTE, tenant un cabaret garni de tajfes» 11 T il ofc vous faire , Madame , ce ridicule aveu ? TULLIUS. Pardonnez , Mademoifelie , un fcrupule qui ne vous fait qu'honneur. POULETTE. Tu bleu , voilà un plaifant honneur -.Pour qui me prenez- vous , Monfieur le jocrilfc ? . TULLIUS. Mais , Mademoifelie. POULETTE. Mais, M. le Docteur, apprenez qu'une fille de mon ef- pecc n c(t pas faite pour écouter les ticurettes deshomnics; FARCE COMIQ^UE, if Se rendez grâce à la prèience de ma Maïcreire , fi je ne vous dévifagc pas. M-n^-^ BERTRAND. Modérez- vous , Poulette : Retirez-vous , Monfîeur Tullius; POULETTE. C'eft ce qu'il peut faire de mieux. TULLIUS. Quelle verte amazone ! que cet-te Poulette. POULETTE. Je crois que vous me regardez encore , M- le Pédant ? Tdllus fort. SCENE VII. M.™» BERTRAND, POULETTE. M."^«BERTRAND. V o u s êtes vive , Poulette. POULETTE. Comment donc , Madame , peùt-on l'être trop fur cer- tains chapitres? Oh I vous ne me connoiiTez pas. M.™= BERTRAND. Pardonnez-moi, je vous connois très-bien. POULETTE. Pas tant que vous le penfez , Madame. M. -^^ BERTRAND. LaifTons cela , & dites moi lî Madame Guillaume va det cendre déjeuner. POULETTE. Autre originale. Cette bégueule eft fcandalifée que vous ne foyez venue fa voir auparavant comment elle a palîè la nuit, & elle ne defcendra pas aue vous n'v veniez. M.'"^ BERTRAND. Il faudroit ne s'occuper que de cette femme: Les gens fans politefle ne trouvent jamais qu'on leur en fafle alfcz. POULETTE. ; C'eft que vous êtes trop bonne au(îi , Madame^ lî c'croit moi , allez , il y a lonetems que j'aurois envoyé paître tous ces animaux-là -, c'eft Bien une femm.e comme vous qui doit fefoumcttre à pré venir, une Madame Guillaume. Voyez- un peu cette impertinente, qui s'avantPT;e de votre complais fance , jufqu'à vouloir que vous vousiCrouviez à fon lever. Une Piocureufe au lever d'une Marchande de foin î ne fau- JC^ V È C 0 L lE R; dra-t-il pas aufïi que vous lui ferviez de femme de cham- bre? Mort de ma vie, Madame, faites fcntir ce que vous êtes, montrez votre fupériorité , Oc ne laifîez pas dire à tout le monde que Madame Bertrand, avec tout (on mérite & Ta Terre Seigneuriale le trouve trop heureuie d'avoir M. Fan- fan pour gendre. M."^= BERTRAND. Vous avez du bon fens , Poulette \ cependant modérez le zèle que vous me témoignez j il faut réfléchir avant de prendre un parti. Arcz vous vu le jeune homme ce matin j que fait-il? POULETTE. Ah ! pardi ! ce qu'il fait à l'ordinaire, Madame. M.'"^ BERTRAND. Mais encore? POULETTE. Des imbécillités, des fottircs. 11 a pris le tems de l'ahfcnce de .'on Précepteur pour aller au jardin cueillir un bouquet, je ne fais pas quel étoit fon defîein j mais tout en faifant fa botte, je le voyois regarder aux fenêtres de votre appartb- ment, avec des foupirs ,- desextares,& d'autres démonftra- lions de tendrelTe à faire pitié , & à faire mourir de rire. M."v- BERTRAND. Le fïngulier garçon. A-t-il vu ma fille ? POULETTE. A propos J j'oubliois de vous dire qu'il en a penfé mourir de frayeur. M."»» BERTRAND. Et comment donc ? POULETTE. Mademoifelle Julie s'eft rencontré fur l'efcalier, comme M. Fanfan defccndoit ; à fa vue , mon bénet a regrimpe les degrés quatre à quatre , s'eft enfui dans fa chambre , & en a fermé la porte fur lui , comme fi le diable eût été à fes ttouflcs. M."- BERTRAND, lia de l'antipathie pour ma fille, cela cft fur; mais je vais chez fa ra;;rc. Poulette, tenez le déjeûner prêt, nous ne tarderons pas à Uefccndrc. FARCE COUKIUE. 1^ SCENE V I I I. POULETTE. V^u'est-cc que cela veut dire? Je croyois que mes dif- cours &: mon récit alloient augmenter la difcorde entre ces deux femmes, & point du tout, celle-ci en devient plus douce tk; plus humaine que je ne l'ai jarnnis vu. Il y a là- defTous quelque myftere que je ne connois pas \ mais ventre bleu J'entens du monde. SCENE IX. POULETTE, JACQUELINE. POULETTE. B G N , ce n'eft que toi , Jacqueline ? JACQ^UELINE. Qu'appelles-tu , taquin , ce n'eft que moi , eft-ce que tu me comptes pour rien ? POULETTE. Parbleu oui » je craignois que ce ne fût le Précepteur , 5c j'avois fait un apprêt de grimaces femelles qui n'eft pas de mife entre nous. As- tu quelque nouvelle à m'apprendre ? JACQUELINE. Tu mériterois que je ne t'en dife rien pour te punir. POULETTE, rw/zr. Pour mè punir? Vas, mon enfant, fi la rancune t'erapê- choit de parler , la pénitence retomberoit fur toi. JACQUELINE. Parles-donc, maraut, que veux-tu dire? POULETTE. Vas-tu te fâcher ? Je m'en vas. JACa.UELINE. Ecoutes-donc. POULETTE. Tu vois bien que tu me rappelles. JACQUELINE. Tu es bien heureux que l'aiïàirc foit de conféquencc, car je ne te dirois mot. . it6 V ECO L I Ê k\ POULETTE. Eh bien ! ne dis rien ; contente-toi , ma charmante j je m'en vas moi. J A C QJJ E L I N E , (F un ton d'impatience. Refteras-tu î POULETTE. Je reviens pour la féconde fois, mais prens garde à la ttoificme. J A C QU E L I N E , précipitamment. Ton Maître vient d'arriver, il eft defcendu à l'Auberge du Cheval blanc , il n'a eu que le tems de fe débotter ; on dit qu'il eft en deuil , je ne fais pas de qui \ mais il fe porte bien , il va venir ici , ôi il a envoyé un exprès pour nous en- avertir pendant qu'il fe repofe de la fatigue de fon voyage Ainfi POULETTE: Repofes-toi aufïi , mon enfant : où eft cet exprès? J ACQ^UELINE. Il eft, parti, mais Valere voudroit avoir un entretien avec Julie avant de fe préfenter à fa mère , comment ferons-nous pour le lui procurer. POULETTE. Ma foi je n'en (à\s rien ; qu'il vienne , nous verrons à le fa- tisfaire : vas-t'en cependant prévenir Julie. JACQ.UELINE. J'y vais , mais auparavant , dis-moi ce que te veut M. Tullius. Tu m'as prife pour lui quand je fuis entrée , ilfem- bloit que tu l'attcndi/Tes. POULETTE. Refpedcz ce myftere MademoifcUe. Quand il fera tems , je faurai vous l'apprendre. J A C au E L 1 N E. Et quand me rappiendras-t u î POULETTE. . Eh ! parbleu , quand je le faurai j tu es bien prcflee , la dé- claration n'cll; pas faite; cependant prépares d'avance un hommage très-diftingué au pouvoir de mes attraits. J'ai lieu de croire c]i\z mon triomphe ne fera {Mis longtems équivo- que , &c qu'il fera brillant. " r. - '" ■ JACQUELINE. Et quel eft donc l'adorateur prétendu de tes charmes puif- fans i POULETTE. Devines. JACQUELINE. J ACQ^UELINh. Que fais-je moi , eft-ce le Vacher î POULETTE. Fi donc. Le Berger ? Allons donc. JACaUELINE. POULETTE. JACQUELINE. Le Jardinier , le Cocher ? POULETTE. Mieux que cela. JACQUELINE. Eh l qui donc ? Le Sonneur ? Le Bedeau } Le MarguUlicr* POULETTE. Mieux que tout cela , je te dis , mieux que tout cela. JACQUELINE. Mais , dis-moi donc à la fin j car je fuis lafTe de deviner; POULETTE. Les Grecs Ôc les Latins l'ont attachés à mon char , la froi-' deur rébarbative du Précepteur de M. Fanfan a change de nature au feu de mes beaux yeux. JACQUELINE. Quoi ! M. Tullius feroit amoureux de toi? POULETTE. Il en extravague , en confcience '-, ce n'eft pas pour me vanter , mais depuis huit jours , c'eft un plaifir de voir fes emprefîemens auprès de moi •, il s'échappe tant qu'il peut d« fon difciple pour me rendre des foins ; il me fuit partout , au grenier , à la cave , à la bafle-cour ^ il dcfcend mon bois , il monte mon vin, porte à manger aux dindons i j'ai beau le rebuter, lui dire des duretés, des injures mêmes, il tient bon , il revient déplus belle, ôc je crois qu'on l'aflbmmeroit plutôt que de l'y faire renoncer ; je veux m'en donner le plaifir. J ACQUELINE. As-tu dis cela à Madame ? POULETTE. Je n'ai garde vraiment: ne t'avife pas d'en parler non plus a car je n'aurois plus d'amoureux , & il faudroit que tu m'en rendifTesun autre; oui, je ne fais pas li c'cltle caractère atta- ché à l'habit féminin , mais c'eft un i\ grand contentement pour moi de voir un pauvre diable fe damner à mon hon- neur 3c gloire , que je mourrois d'ennui à préfent li cet amu- fement-là vcnoit à me manquer-, ainfi garde le fecret exacte- ment , je t'en prie. ,jj V écolier; JACQUELINE. Ne t'inquiètes pas , je fervirai même de confidente à ton Pédant , mais c'eft à condition que tu me rendras compte de tout ,car je luis curieufe. POULETTE. Je te le promers : en attendant , vas prévenir Julie , &: fi Valcre vient j avertis moi. Tiens voilà juftement mon fou- pirant. JACQJUELINE. La belle conquête ! POULETTE. Ne ris donc pas , morbleu , tu gâteras tout. SCENE X. TULLIUS, POULETTE, JACQUEUNE. TU L L I U S. J-E vous demande pardon , Mademoifelle, je croyois trou- ver ici ^4adame jmais puifqu'elle n'y eft pas , je me retire. JACdUELlNE. Pourquoi donc? Voilà Mademoifelle Poulette, mais je vois bien que je vous gênerois ; adieu Monfieur TuUius, je fuis de vos amies. Je ne fais pas fi c'eft que votre perruque eft mieux mife > mais vous avez aujourd'hui une certaine phi- iîonomie fi féduifante , que vous feriez ma conquête fi je ne m'en allois pas. Adieu Monfieur Tullius. £'. - 1 -^ SCENE XI. POULETTE, TULLIUS. POULETTE. JLjE voilà muet. {Elle le regarde un moment en filence pendant que Tuliius r admire) Eh bien, M. TuUius, eft-cc là tout ce que vous voulez me dire? TULLIUS, <^ part , la conjîdérant toujours. Qu'elle elt aimable ! POULETTE. Vous me regardez , vous vous tournez de tous les côtés > eft-ceque vous avez perdu quelque chofe ? r ÀRC E COMIQUE. 19 TVL'LlUS.foupiram, Hélas ! oui. POULETTE. C'eft fûrement quelque chofê de conféquênce > car vous foupirez : TULLIUS. Hélas ! oui Mademoifelle. POULETTE. Hé bien, il faut cherciier , vous retrouverez fùremetit, il n'y a pas de voleurs ici. TULLIUS. Pardonnez-moi, Mademoifelle, j'en connois de très.-dan- eereux > ÔC dont j'ai ^rand fujet de me plaindre. POULETTE. Bons dieux ï vous dites cela d'un ton de douleur qui me £end le cœur, TULLIUS. Plût au Ciel , Mademoifelle , que vous y priuiez intérêt. POULETTE. Pourquoi donc j ferois- je capable de vous faire retrouver votre vol î TULLIUS. Cela dépendroit de vous , puiR]ue vous en êtes la feceleuTe. POULETTE» Moi , receleufe d'un vol ! TULLIUS. Vous m'arrachez cet aveu , tigrefTe incom parable. Battez- moi 5 tuez-moi fi vous voulez , je ne puis plus le retenir 5 il faut que l'apoftume crève ; c'eft mon cœur qui m'a été ravi. Deux voleurs plus entreprenans que les Argonautes ont com- mis ce forfait j &: ces voleurs font vos beaux yeux. POULETTE. Mes yeux ? TULLIUS. Ouij cruelle , ce font eux. Les miens depuis quinze jours vous crient miféricorde , &: vous avez la barbarie de ne paâ les entendre. POULETTE. FinifTez donc, Monfîeur Tullius , finirez donc ; vous vous âmufcz à mes dépens. Ell-il pofTibie qu'un homme de votre rang daigne s'abailfcr à une fille de mon cfpèce , aune femme de charge. , TULLIUS. Oui , pouponne adorable. Si la fortune diftingue les états > l'amour fe fiit un jeu de les confondre j je vous aime, je vous adore , je vous facrifie tout. B ij ao VÈCOHEk; POULETTE. ' Cela ne (c peut pas , je vous dis , vous me periïfflez.' TULLIU:>. Et qwc faut- il donc faire pour vous en convaincre? Faut-il iTV'égoi'gcr, me pendre; parlez , me voilà prêt à tout. i!^h! belle Poulette, vous ne connoiflTcz pas le pouvoir de vos at- traits-, non» ma DcefTe , vous ne les connoifTez pas Votre charmante perfonne retrace à mes yeux un abrégé parfait de tout ce que l'antiquité connoiiîbit de plus accompli \ c'eft la taille de Minerve , les yeux de Juron , le fourire de Vénus , la main d'Hebc, cette main charmante, que le maître des Dieux avoir choifie exprès pour lui verfer à boire i cette main , dis- je.Ti'avoit pas la grâce de la votre, Si vous l'armez d'un ba- lai , il me femble voir la chaflie Diane armée d'un dard , bC pourfuivant les bêtes fauves dans la forêt \ je me fouvicnsque rien n'échappoit à fes coups , &; la raifon ne m'empêche pas de courir au devant des vôtres, POULETTE, C'eft donc à dire que vous êtes bien amoureux î TULLIUS. Je le fuis au point de pafler les jours entiers fans manger, & les nuits fans dormir. POULETTE. Cela eft trifte-, mais enfin , que voulez- vous que je faffè \ faut-il que je vous empâte , que je vous berce ? TULLIUS. Non, nxa Reine , promenez moi de répondre à l'ardeur de ma flamme , vous me rendrez par ce mot feul , le repos , la vie. POULETTE- \ En honneur, Monlîeur Tullius , cela ne m'eft pas poflîble; TULLIUS. £t qui vous en empêche ? POULETTE. Ah ! vraiment, chacun a fes petites raifons ; ne faudroit-il pas tout vous diie ? » TULLIUS. Je vous devine, ingrate, mais où trouverez-vous un fervi- teur plus tendre, plus fournis que moi? POULETTE. Je ne puis pas réellement m'accommoder de votre fcrvice ; croyez- mo' , Monlîeur Tullius, fî vous avez intention de trouver maître, cherchez condition ailleurs. TULLIUS. Non, je m'attacherai malgré vous-même à votre cliaînt FARCE C 0 M I (l U £. ir tigourcufe , je vous fui vrai comme un brabct: , je verrai, tous, ceux qui vous approcheront, & je vous tourraencerai tant. >.,. POULETTE. Prenez y garde au moins , M. TuUius, car fi vous ra'in- patientez ; je ne fuis pas méchante, mais je vous aurois plu- tôt donné vingt coups de po':ngs> 5c autant de coups de pieds au cul , que vous n'auriez recardé par où. TULLIUS. Eh bien faites \ je ne vous en aimerai pas moins , ingrate r J'en jure par cette main charmante. Il veut lui baifer U main, POULETTE. Apprenez donc ce qu'elle fait faire. Elle lui donne unfouffltt. T U L L 1 U S voulant encore bai/èr la main de. Pouùtte^ Inhumaine î perfide î POULETTE. Ah ! vous y revenez-, recevez encore cet échantillon de Tautre menote. ( Elle lui donne un foufflet de la main gauche , 6* utk coup de genou qui le jette par terre.) Etes VOUS content î 1 V LLl\J S par terre. Cruelle , vous m'avez terraflc fans m'ôter le courage. POULETTE. Eh bien , nous recommencerons fi vous y prenez goût, ra- maflez-vous rou jours en attendant y, de. peur qu'on- ne vous- furprennc fait comme vous voilà. TULLIUS. Il eft vrai que je fuis tout en défordre, mais la caufe en eft £ belle. POULETTE. Je voudrois bien que quelqu'un vmt> comme on riroit de- voir le grave Précepteur de M. Fanfan décoeiîé par les fer- vantes ; mais voilà mes vccux exaucésjaecourcZjM* Fanfan.. rVLLlU S, à part. Ah ciel î mon Difciple ! où me cacher; a^ SCENE X I L M. FANFAN, M. TULLIUS, POULETTE, FANFAN. A. H î ah î c'crt: drôle; eft-ce que vous faites votre roiiîctrft ici, MonfieurTullius?Mais qu'eft-ce qui vous e(t donc at- rivé î Vous êtes tout poudteux. Biij %i V ÉCOLIER; TULLIUS-. Ce ne font pas vos affaires , Mon/îeur , retournez à votre chambre. FANFAN. Pourquoi donc retourner à ma ciiambre ? Ma mcre a fait dire que je ddcende ici pour déjeûner. TULLIUS. Sortez tout à-l'heure, petit drôle. FANFAN. Je ne veux pas m'en aller , moi j ma mère a dit que je vien- ne ici a & je veux y reftcr. TULLIUS. Vous voulez y reftcr , petit coquin j à qui croyez-vous donc parler î qui eft-ce qui eft le maître ici ? FANFAN. Vous l'êtes dans notre chambre , mais pas ici. Défendez- moi , Mademoirelle Poulette ; empêchez qu'il ne me faffe fortir. POULETTE. M. Fanfin a raifon , vous n'êtes point le maîrre ici. Je re- préfente ma maîtreffe, nous fommcs chez ellc^: je prens M- Fanfan fous ma protediion. Voyez comme vcus l'épou- vantez, il elt tout tremblanr,ce pauvre petit. TtJLLIUS,i/^^r/. Comme il la regarde ! mon foupçon n'cft que trop vrai. ( haut) De grâce , Madcmoifelle , n'empêchez pas mon Difci- ple de nVobéir, & lailfez-moi faire les fondrions de mon mi- niftere. POULETTE. Encore un coup, M. TuUius, laifTez votre Difcipleen re- pos &: rufpendez vos fonclionscn mapréfcnce-, (à Fanfan ) dites-moi , mon petit chat, M. TuUius a-t-il fouvent de c« humeurs-là ? FANFAN. Ol) ! il en a bien d'autres. Je fais bien pourquoi il voudroit que je retournaUe à ma chambre , mais je n'irai pas -, car je nç veux pas vous quitter de toute la journée. TULLIUS, âpart. Le petit fcélérat -* POULETTE. Comment , cft-cc qu'il oferoitcnrore vous donner le fouet? FANFAN. Oh ! il en eft bien capable, mais j'efpere biçn que vous me défendrez, n'eil-çepas, MadçiïvoireUc ? FARCE C O M ï comme il piétine> ihvez-vous qu'il me fait peur ? POULETTE. Ne craignez rien, vous dis-je, ôc puis voici votre pré- tendue. TULLîUS. Ah ! le Ciel Toit loué. Julie entre. SCENE XIII. JULIE, LES PRÉCÊDENS. TULLIUS, courant à Julie JMademoisell E, je me recommande à vous.' JULIE. QuVft-ce qu'il y a donc , M. TulHus , vous êtes bien îîgité? TULLIUS. C'eft avec raifon, Malemoilelle, voilà un libertin que je préparois à devenir votre époux, ôc qui s'en rend indigne. Je vais avertir Madame fa mère de (es dépottemcns. Ayez Ta-il Biv at4 V È C O L I E R; iur lui pendant mon abfence : Mademoilellc , votre gloire y cft intéreflee , &: Madame votre mère vous en faiira gré ; ayez-y rœil. Oh ! nous verrons petit drôle , li vous me ré- iîfterez impunément. Il fort. SCENE XIV. JULIE, POULETTE, M. FANFAN. JULIE. xj^ u E veut dire tout cela , Poulette î POULETTE. C'eft un petit différend qu'il eft inutile de vous racconter. ^àpart. Savez- vous que Valere eft ici ? JULIE, bas à Poulette. Jacqueline m'en a inftruite 3 &: je vcnois exprès pour t'en parler. P O U L E T T E , à;j^r/i/tt/i^. Cela Tuffit. ( haut àFanfan. ) Eh bien î M. Fanfan , que n'ap- prochez-vous : Mademoifelle ne veut pas vous faire de mal. FANFAN. T'ai peur d'elle auflî. JULIE. Pourquoi donc ? FANFAN. Oh ! c'eft que vous vous entendez avec mon Préccpteur> te vous me faites toujours la mine quand je fuis devant vous. POULETTE. C'eft mal \ ôc par quelle raifon , Mademoifelle , faites-vous la mine à M. Fanfan quand il eft devant vous ? JULIE Il a tort , j'ai beaucoup d'amitié pour lui. FANFAN. Oh bien ! vous avez tort auffi, car je ne vous aime pas, moi. JULIE. La déclaration eft honnête. FANFAN. Elle eft finccTCi du moins; tant pis û cela vous f5che. JULIE. Vous ne me faites point de peine , je vous aflure i ne vous contraignez pas. T'jtRCECOUlOlTE. if F A N F A N. Vous voyez bien que je parle tout naturellement. POULETTE. Il y paroît. FANFAN. Oh ! quand mon Précepteur n'y cfl: pas , je dis ce que je fenle , moi. POULETTE. Mais quand il y eft , aufîi , vous n'êtes pas fi hardi. FANFAN. Pardi! il eft toujours à me menacer-, mais laiflez fâirc^ .non tour viendra , & peut-être plutôt qu'il ne penfe. POULETTE. Vous avez raifon , montrez du courage, M. Fanfan \ quel âge avez-vous? FANFAN. J'ai vingt & un ans & trois mois, vienne la Saint-Gilles i Madcraoifelle. JULIE, fourîant. Vienne la S. Gilles ? FANFAN. Oui , c'eft ce jour-là ma Fête. POULETTE. A propos de fête , M. Fanfan , dites* moi un peu à qui VOUS deftinez un certain bouquet que vous avez cueilli tantôt. FANFAN. Eft-ce que vous m'avez vu dans le jardin î POULETTE. Oui , j'étois à vous examiner avec Mademoifolle , & nous avons obicrvé que vous mettiez beaucoup d'attention à cet ouvrage , de que vous y preniez un plaifir tout particulier. ^, FANFAN. Oh ! vraiment, c'eft que la perfoiinc pour qui c'eft, en vaut ia peine; elle eft belle autant que Madcmoiielle, mais je l'aime bien mieux , parce qu'elle eft moins brufquc &: plus complaifante j elle ne m'a jamais fait de chagrins celle-là ; au contraire , elle s'oppofe à ceux qu'on veut me donner : fi on me gronde , elle m'excufe \ ii la timidité me fait dire quel- que fottife, elle la tourne à mon avantage; elle voit mieux que perfonne combien je fuis fîmple& ignorant. Eh bien ! au lieu de me méprifer ou de fe mocquer de moi , il iemblc qu'elle me diftingue -, elle me fait des queftions aifces, elle m'aide à répondre, elle m'encourage, ôc vous diriez qu'affligée de mon peu d'efprit elle veut me donner par compaflion tout celui qu'elle polTede. iS '^ V É C 0 L I E R^ j U L 1 E. Vous ne manquez pas d'e ma mie , on dit que vous foutenez mon fils contre Ion [^récepteur j & que M. Fanfan a l'imbécillité de vous en conter. POULETTE. Madame , les volontés font libres, &: fi M. votre fils veut faire des imbécillités en ma faveur , je fais trop le refpe(5t que je lui dois pour m'y oppofer. M.'"^ GUILLAUME. Je crois que tu plaifantes , la fille ! i POULETTE. La fille n'eft pas mon nom , Madame. M.-«= GUILLAUME. ' ' C'eft donc la femme ? POULETTE. Tout au contraire , Madame. ! M.'"»^ GUILLAUME. Eh bien ! fille ou femme , finge ou guenon , n'importe le- quel ; je te défens de regarder feulemenr mon fils du coin de l'œil , ou. . . . laifTe faire .Je re montrerai de quel bois Ma- - dame Guillaume fe chauffe , entens tu? POULETTE. Madame M."^« BERTRAND. Ne répliquez poinr , Poulette , allez chercher le cafife , Sc dites à ma fille de venir. Poulette fort» SCENE TJRVE COMIQl/É. 5$! SCENE IV. M.-^« GUILLAUME, M."- BERTRAND. M.i"^ GUILLAUME. V^ FTTE drôiefle a l'air d'une égrillarde bien hardie, Mz^ dame Bertrand. M ™= B E R T R A N D. J'en fuis aflcz contente , Madame -, elle eft un peti railleu* fe, mais elle me paroît fort fage , & je ne crois point aux idées de M. Tullius-, aureftej'y aurai l'œil. M.'«^ GUILLAUME. Vous ferez bien , car je la raniaficrois. M'"- BERTRAND. Difpenfez vous de ce foin , êc croyez que M. Fanfan eSt trop bien élevé pour avoir une pareille inclination. M.'^'^ GUILLAUME. N'eft-il pas vrai î Avouez que c'efl: un joli fujet , auflî je n'y ai rien épargné , de il faut convenir que les études for- ment bien un jeune homme. M.-= BERTRAND. Sans doute , Madame , les études forment fon efprit ; mais la nature &c l'ufage des bonnes compagnies donnent de Tac» tion à fon cœur , & en développent les reflbrts. M.-^^ GUILLAUME. De Tadîon ! des rclforts! vous avez toujours des raifonne- mens chimiques &: des empAra/es auxquels je n'entens rien -, c'eft tout comme votre fille. Tenez , la voilà : quand on parle da loup , on en voit la queue j regardez fon air pincé. SCENE V. POULETTE apportant h caffc M.'"^ BERTRAND, JULIE , M.™« GUILLAUME. M.-^^ BERTRAND. A VAN CE z, Julie. M.- GUILLAUME. Oui , approchez de nous , la belle , & faites-nous meilleure mine. EJl-ce que nous vous avons vtndus des pois qui ne cuifentpas .^ 54 r È CO LIE R; JULIE. Te n'cntens pas ce langage-là. Madame. M."'« GUILLAUME. Ecoutez-doncjla mijaurée-, ne diroit-on pas que je lui parle çaulois ? M."^^ BERTRAND. Retirez-vous , Poulette. Votre caffé e(l verfé , Madame. M.'^e GUILLAUME. Ah .'tant mieux, déieûnons, came diftraira^car 1 entre- tien de votre fille commence à m'ennuyer. M.n^« BERTRAND. Julie n'a point defTein de vous déplaire. M.'"e GUILLAUME. Je le crois , mais elle ne fait pas vivre. Dame c'eft comme ça, mon enfant ; je m'apperçois des fautes que vous faites > parce que je fuis très-polie , moi. JULIE. Il efl aifé de s'en appercevoir. M.-^ GUILLAUME. Ce caifé-là ne vaut rien , Madame Bertrand. JULIE. Votre politefle n'eft pas flateufe. Madame. M.'^cGUILLAUME. Oh ! je fuis franche , & je voudrois que tout le monde fût de même , à commencer par vous. M. ">^ BERTRAND. Il eft impoffible qu'on ait tous la même forte d'efprit j ma fille eft un peu féricufe •, mais j'en ai bonne efpèrance. M.™<= GUILLAUME. Jamais ça ne fe fera, jamais- Falloir voir , moi , quand j'c- tois à fon âge. Ah ! pardi ! je n'étois pas mauflade , je vous en répons-, je caufois, je divifois, je parlois fur tout fans rien apprendre. JULIE. Et peut-être fans rien favoir i M.">^ GUILL AUME. Voilà ce qui vous trompe , Mademoifelle , on trouvoît même que j'en favois trop -, &c pour la gayeté , il falloir me voir, je chantois , je danfois , je difois des drôleries, des go- drioles , je faifois rire tout le monde i enfin j'étois fi amufante qu'on ne m'appelloit cheux nous &c partout que la folichonne. JULÎE. C'eft un beau nom pour une deinoifelle. M.n^<= GUILLAUME. Oh î laiflez faire, quand vous ferez ma bru, j'cfpere bien vous remanier ôc vous drefier à mon humeur. JULIE. ^^ Non , Madame , je fens que vous auriez de la peine à faire de moi ce que vous êtes. M."'^ GUILLAUME. ' Voyez comme elle répond,cecte demoifelie doucettej qu'eft- ce qu'elle veut dire ? M.™'^ BERTRAND. LaifTons cela , Madame , je vous prie. Julie , alle^ faire quelques points à votre broderie ; vous direz qu'on vienne ©ter ces taflcs. JULIE. Oui, ma mère» Elle fort. SCENE VI. M.™« GUILLAUME, M.«^ BERTRAND. M.'"'^ GUILLAUME. ^ A V E z-vous que votre fîile eH: une bête , Madame Ber- trand- Quand on lui témoigne des bontc's elle ne répond que des niaiseries qui ont l'air d^ mauvais complimens. M.'"^ BERTRAND. C'ell qu'elle eft fenfible & peu habituée à certaines maniè- res. M.'^e GUILLAUME. Qu'appeliez- vous de certaines manières ? Je croîs que tout le monde peut s'accoutumer aux miennes, je me flatte qu'on n'a rien à me reprocher là-dcifus , & fans vanité M.'^'^ BERTRAND. LaifTons ce difcours , Madame, nous avons à parler de cho* fes plus efllntielles. M.nie GUILLAUME. C'eft que, vous autres Procureufes, vous croyez qu'il n'y a que \ou'i quait de refprif, mais défabufez-vous , & fâchez que nous avons fréquenté des gens qui vous valoient bien > voyez-vous? M.™« BERTRAND. Patlons de nos affaires , Madame , ic vous prie. M.mc GUILLAUME. Mes manières ! mesmanietes ! Ah pardi , cen'efl pas d'au- jourd'hui qu'elles plaifcnt au grand - monde. Falloit voir du tems de défunt ce pauvre M." Guillaume , à qui Dieu falTe Ci; 56 V ECO LI E R, p;iix;il ,ètoit agoni, ^av fes pratiques qui vouloient tous m*a- voir. M.™«= BERTRAND. Je vous crois , Madame -, mais revenons à nos affaires. M.n^^ GUILLAUME. C'écoit Madame Guillaume parci , Madame Guillaum* par-là-, quand eft-ce que nous verrons Madame Guillaume? nmcncz nous donc Madame Guillaume ', on ne favoit qu'elle fête lui faire pour l'engager: cniîn jufqu'à des Marquifcs, Ma- dame, mais de vraies Marquifcs , au moins, qui venoient c/ieux nom avec des caroffcs magnifiques & des Laquais fuper- bes j pour avoir ma converfation. M."^« B E RT R A N D 5 impatiente , àpart> L'afTommante bavarde. M.me GUILLAUME. Et cela à caufe de mon efprit , de mes manières*, auffi fal- loir voir dans le quarquier comme chacun me faluoit quand je pafîbis , comme on fe rangeoir, queux écarts, queux révé- rences', mais nous avons d'autres brayes à retourner , comme vous dites, revenons à nos moutons. Il s'agit du mariage de votre fille avec mon fils 5 c'cfl: un parti riche , je n'ai pas befoin de le dire puilqne vous le favez j mais c'eft dir. Vous avez une tcrie , on ne fait pas trop comment votre mari fe l'eft appro- priée, cane tait rien. M."^'^ BERTRAD. Que voulez-vous dire , Madame ? mon mari étoit honnête homme , 5c M.nie GUILLAUME. C'eft égal , vous avez la terre , c'eft le principal : enfin , mon deffein eft de placer M. Fanfan dans le militaire \ il efî beau gardon , ipirituel, bien campé , ça lui conviendra , & ça vous fera honneur. M.™= BERTRAND. L'honneur fera du moins réciproque. Madame Guillaume. M.m'^ GUILLAUME. Oh !rout doux Madame Bertrand , encendons-nous. U.^^ BERTRAND. c Oh ! avec votre permiffion Madame Guillaume, je m*en- tcns trcc-bien , la veuve d'un Procureur vaut bien celle d'un Marchand de foin \ lî je n'ai pas cheux moi de vraies Mar- quifcs , cela n'empêche pas que je ne m'apprécie, & que je ne trouve fort mauvais qu'un peu de bien engage certaines gens à fe méconnoître dans ma maifon. : ^ , M.nic GUILLAUME. : Vous VOUS enlevez comme une foupenu lait à propos de botte. Q;f cfuce qui pcnfc à fe méconnoître î FARCE COMIÇtUE. ^y M >^«- B E R T R A N D. Voua devez le lentir , Madame , quand on cfi; aufîî exf- geante iur les procédés >ii ne £iut pas manquer roi-même , ni s'oublier comme vous faifs. FouUtte entre, M'"«= GUILLAUME - Mon'Dieu ! Madame Bertrand, voâs avez toiijours des mors à double entente. Quand il cH: queilion d'aiiiircs ,. îaut-il.-ï'<ï/?i- coter comme ça? Ne vaur-il pas mieux parler tour uniment? frjj.mm m ■■iiw ii iMjPif ajn^ SCENE VIL POULETTE ET LES PRÉCÉDENTES. M.»"' BERTRAND, à Madame Guillaume. v- qui demande la permifîlon de paroître. . M.""*^ BERTRAND. _. . A -part.- Autre importun. Haut Faites entrer , & donnez-moi mon tambour à broder. A Madame. GuilLiume. Ccîtc co!r,p;i2nie^ Madame , pourra vous dcfennuier de la nôtre,j .^o^kt^ Jhru M.™e GUILLAUME. ^ Qu'eft-ce que c'eft donc que ce Monikur ? M.'^-BERTR AND. C'eft un jeune Officier fort "aimable , mais vous en pou- vez juger. Valere entre^ *\,u^ Cm^ 3? L ÉCOLIER, SCENE VIII. VALERE ET LES PRÊCÉDENS. M me GUILLAUME, prenant fon fac pour faire des niiudu Xl a vraiment bonne mine. M."^^ BERTRAND, froidement. Vous nous furprenez , Moniicur Valere. VALERE. J'ai ofé me flatter que vous voudriez bien ine pardonner cette liberté. j^ n.c BERTRAND} prenant fon tambour pour broder^ Avancez un iiége, Pou ette. Falere va au devant de Poulette ■ pour recevoir le fîége . & en le lui donnant. POULETTE lui du bas. Vous vous fouvcn^z de tour ? VALERE à part. Ne crains rien. Poulette fort. M.'"«= BERTRAND, travaillant. Sans doute que vous n'êtes pas ici pour longtcms ? Venez- vous de loin , Monlîeur ? VALERE. J'arrive de l'armée , Madame, pour une affaire aflez triftc. M."""^ B fc R T R A N D > froidement & travaillant. Ah !ah .'que vous eft il furver.u ? VALERE. Mon oncle, que vous connoifliez, efl: mort depuis huit jours. M .'^«^ BERTRAND, négligemment. Ah ! tant pis. Elt ce qu*il vous deshérite? V A L fc R E. Non, Madame, il me hifîe dix mille lîvi-es de fente. M."^ B E R T P AND, v'vement, . Ah î tant mieux , approchez-vous donc , mon cher Mon- teur, cela doit cffjcflivenient vous avoir affligé. VALERE. Extraordinaircmeut , Madame; cela n'ç/l" pas croyable. J ai cependant eu la force de recueillir la fucccliion , & mon pre- mier foin enAïke a été de venir vous annoncer cetrc nou- velle, pcrruadé, Madame que vous me confervlcz aflez d'a- mitié pour prendre part à la vive douleur que cette avanturc me caufe. FARCE COMIQUE. fa. M."^^ BEKTRAN D. AfTurcment , Se je prétends vous en diftraire , car je rae flatte que vous pafTerez quelques Tcmaines avec nous, V A L E R E. Je rends grâce à ma bonne fortune de cette offre obligeante , h^adame , &c je l'accepte avec reconnoiffance -, mais je m'ap& perçois que vous êtes en compagnie , j'incommode peut-être ? M.n^^ BERTRAND. Point du tout , Madame eft de mes amîes , & notre con-* verfation étoit indifférente. M.™e GUILLAUM E,faifant des nœuds. Et puis , Monfîeur n'eft pas fait pour y rien gâter. V A L E R E. Vous êtes bien bonne , Madame •, mais je ne me trompe pas. ... Je crois.. . mais oui je crois que c'efl Madame Guillaume à qui j'ai l'honneur de parler. M.n^e GUILLAUME. Ah ! Monfieur, c'efl bien de l'honneur pour moir-même, que d'être connue de vous. VALERE. Eh ! où ne vous connoît-on pas, Madame? Eft iLun nom plus célèbre que le votre? Y at-il trois chevaux de qualité qui n'aient pas mansé du foin de Madame Guillaume? M.n^^GUILLAUME. Il eft vrai que les Grands Seigneurs m'ont toujours donné la préférence , & je fuis bien aife que vous en rendiez témoi- gnage devant Madame Bertrand. VALERE. Je le fout'endrois devant toute la terre i oh ! ccmprçz. Madame , que vous avez en moi un ami très cfîéntiel &c tiès- zélé -, mais à propos d'ami , comment fc porte JM. FanfanV M.n^e GUILLAUME. Eft-ce que vous le connoifTez aufîi ? VALER.E. Mais , vraiment oui , Madame. Où eft-il , que je l'erabrafTei? A t-il fini fesérudes ? Qu'en faites-vous î à quoi deftinez-yous cet aimable Cavalier ? M. "^^ BERTRAND. Madame adefTein de le placer dans le militaire. .:••:•■-:■ VALERE. C'eft bien -penfé ', foycz perfuadéc. Madame Guilfannne * que M. Fanfan fera très- conlîdéré , (i Ton mérite répond à la haute eftime qu'on a conçue de vous fur la qualité de vos marchandifes. Civ %<} V È C 0 L I E r; M " GUILLAUME. Mes marchandiles n'ont pas befoin là. V A L E R E. Pardonnez- moi , vous êrcs trop modefte ^ il faut ToufFrir qu'on vous rende juflice , & je protcfte devant Madame 3 que votre foin a toujours paffé pour le meilleur foin qui fe puifTe manger à Paris, en homme d'honneur. Mais je fuis allarmé d'une chofc j on m'a dit que M. Fanfan doit époufcr la fille de Madame Bertrand. M."- BERTRAND. Cela n'eft pas encore décidé du côté de ma fille. M.'"^ GUILLAUME. Ni du côté de mon fils , Madame. V A L E R E. Ah ! tantmicux, car l'aurois été contraint de m'oppofer à /es prétentions. M.me GUILLAUME. , iVouSj Monfieur 5 & envercu de quoi? VALERE. J'ai des raifons très fortes pour arranger cela tout diffé- remment. M.'"^ BERTRAND. Vous oubliez , Monlîeur , que je fuis la mère de Julie. VALERE. Au contraire, Madame, c'efl principalement à caufe de Cela que je compte fur la préférence. M n^c B £ R T R A N D. Vous me paroifîcz un peu préfomptucux. VALERE. Dires raifonnable > Madame •, comment , au moment où je fuis pénétté de la mort d'un cher parent qui me lailïe une for- tune j vous auriez Ja cruauré de me caufer un {urcroit de dou- leur, en me facrifiant à M. Fanfan. Mais imagii^ez donc Madame à quel excès le défefpoir pourroit me porter -, tenez, je m'en rapporte à Madame Guillaume. M.'"c G U I L L A U M E , d'un ton d'humeur. Vous avez tort , je fuis muette là-defîus. VALERE. Ah ! parlez , Madame » parlez , je vous en fupplie. J'ai en- tendu vanter votre cfprit par deux cens perfonnes de qualité; on dit que cciï nn petit malicieux , qui fe cache de tcms en tcms, mais dufllcz-vous m'injurier, je veux le forcer à pa- jroîtrc, vous aurez beau en rire. \L'"c GUILLAUME. Taifez-vous , badin. FARCE COMIQUE. ki M.'»«=BERTR A N D. Savez-voLis , Valcre , que vous prenez un furieux afcen- dant fur relpric de Madame Guillaume ? M.'"«GUILLAUME. Vous voilà toujours. Eft-ce ma faute fî Monfieur me fait des honnêtetés? N'allez-vous pas encore en être jaioufe î M.'"«-BE RTR AND- Point du tout. Je ferai même ravie que Monfieur vous in- téreflc en fa faveur. VALERE Je l*efpere , Madame , en fuppofant toute fois que y9as voudrez bien me le permettre. M.- G U I L L A U fvl E. Je vous le permets , moi, n'eft-ce pas affez? Allez , Mon- fieur, laiflez dire Madame Bertrand, elleefl; un peu envieu- fe , mais je le lui pafle , une femme comme moi e{l audefTu* de fes minus'ries. VALERE. C'eft très-bien ^parlc , Mad me Guillaume j laifTons-là ces minus' ries , Sc accordez-moi une faveur. M.™e GUILLAUME. Ah ! demandez , qu*cll:-cc que c'cft ? VALERE. Procurez-moi le plailir de voir M- Fanfan. ^ M.nie GUILLAUME. -' Oh ! volontiers ; il eft en pénitence , mais je veux bien l'di retirer à votre confidération. Elle appelle. Jacqueline! V A L E R E 5 à Madame Bertrand. Vous ne dites rien , Madame , à quoi réfléchifiez vous ? M."^^BERTRAND. Je fonge que la douleur qne vous caufe M. votre oncle ne vous crapcche pas d'être fort gai. VALERE. . C'eft qu'il eft mort la nuit , Madame , Se c'eft auffi le tems que je donne à mes larmes. Cela m'eft d'autant plus com- mode qu'il feroit malhonnêrc de pleurer en plein jour, en Bonne compagnie. Qu'en dit Madame Guillaume î M. ■:<= GUILLAUME. Je dis que vous êtes drôle, en vérité vous m'amufez tout plein ; mais où cft donc cette Jacqueline? £i/f'î/ï'e//f.Jacque-. Une ! Jacqueline I ^1 V ÉCOLIER, SCENE IX. JACQUELINE , VALERE , M."- GUILLAUME , M. "^ BERTRAND. JACQUELINE. JVl E voilà , Madame , me voilà. M.m. GUILLAUME. Faut donc que je braille après vous pendant trois heures! JACQUELINE. Madame , je vous demande excufe. M."^e GUILLAUME. Allez, bégueule, dites à M Tuliias d'amener mon fils pour faire fa révérence à un Monficur d'armée qui le connoît , & qui fera charmé de le voir. ■ Jacqueline fort. SCENE X. yALERE, M.«^«= BERTRAND, M.-^ GUILLAUME. VALERE y-»*EST un plaifir d'entendre Madame Guillaume, on n'a /amais donné fes ordres dans un plus beau ftile. M.'"^ GUILLAUME. Il eft vrai que tout le monde m'a fait compliment fur ma belle manière de parler , c'eft ce qu'il faut [avouer. VALERE. Il faudroit ç'é/rs bien fourd pour ne pas s'en appercevoir , M. Fanfan a tie qui rcnir M."^=GUILLAUME. Oh .' pour ça, je vous a/Ture que c'eft un maître efpiegle ; mais le voici. S C EN E X I. LES PRÉCÉDENS^- M/i^^ ET M. FANFAN. M."'^ GUILLAUME, i Fanfan. A V A N c E z poli/fon & faites fervitcur -, ce n'cft pas Mada- me toute feule que je vous dis de falucr i eft-ce qvie vous ne voyez pas Monlîeur , imbécile ? T A R C Ê C 0 M I (lu E. 4$; F AN F AN. Oui, ma mère. M.'n* BERTRAND. Allons donc. V A L E R E. EmbrafTez moi » M. Fanfan i il a la plus heureure phifîo- nomie du ironde Madame , vous avez raifon oe dcftinerM. votre fils à ha guerre, il a l'air ôc le tnainrien mart'al. "F A N F A N , toujours occupé à regarder Madame Bertrand^ dit à part. Qu'elle eft belle: M.'"<= GUILLAUME. Remerciez-donc, nigaud*, où a t-il les yeux ce hêta-l^'i M."^«'BEKTR AND. Mon Dieu ! Madame , ne Tintimidez pas. xM.n^e GUILLAUME. Mon Dieu ! Madame Bertrand , mêîcz-vous de vos affai- res. Levez la tête, petit drôle, & apprenez que quand in queu- qu\un vous fait un compliment , on écoute , on ialue , &: puis on dit tout de fuite, vous avez bien de la bonté , Monfieur \ m'entendez vous ? F AN F AN. Oui , ma mcre. M.™« GUILLAUME. Eh bien ! ditcs-donc. V A L E R E. Tenez, Madame Guillaume , faifons pafler M. Fanfan à- côté de Madame , & il fera plus à fon aife ; allons, mon cher ami , placez vous ici. M.'^-GUILLAUME. - Pourquoi ne pas le laifTer avec fon Précepteur , il v^ g?- TïCr Madame. M. TulHus court chercher iejïc^e di Farfaiu M."^- BERTRAND. Point du tout. AfTeyez-vous , M. Fanfan, & prenez ,cpu- raffe ', eft-ce que vous êtes fâché d'être à cette place ? FANFAN. . , ..,:: Oh ! non. Madame, je vous afllire, je h ai jamais été fi content. '. . " ' "f VAt-ERE. '• Vous voyez bien , Madame Guillaume.,'le voilà Qui parle » j'ai vu tout d'un coup ce qu'il lui falloir , moi. M."^e GUILLAUME. Ah '.oui, vow%'^c M. '"«Bertrand', vous feriez deux bons gâteurs d'cnfansj mais puifquc le vdilà,'& que vous avez la 314 V écolier: complaifance de^^ous en amufer, je veux que mon fils vouî farte voir fes talens. Approchez , Monfieur Tullius.» TULLIUS. Me voici , Madame. VALERE. Monfîeur eft donc le depofîtaire des talens de M. votre ^Is? M."^« GUILLAUME. Oui, Monfieur, c'eft Ion Précepteur, homme de très- grand mérite, &: que je confidere. VALERE. Par ma foi , je ne m. 'en dourois pas \ fur fa contenance je le prenoispour un Valet de Chambre i excufez au moins, M. TuUius. M.""= GUILLAUME. Toujours plaifant , M. Valere , mais ce n'efl: pas cela ^ il faut , Monlîeur TuUius , que vous faiiiez réciter à mon fils quel- que chofe de ces leçons que vous lui fuœs apprendre, mais quelque chofe d'amufant, là, quelque chofe de joli , d'agréable. TULLIUS. Très- volontiers , Madame j mais il faut, s'il vous plaît, que je m'abfente pendant quatre fécondes, je n'ai pas le car- ton des devoirs. M. - GUILLAUME. Mon fils ira le chercher -, entendez-vous , M. Fanfan , à qui eft-ce que je parle ? FANFAN, revenant comme cHune extafe. Plaît-il ma mère? M.'"'= GUILLAUME, /e comrefaifant. Plaît il ma mère? Eft ce que vous n'avez pas d'oreille? vous êtes à rêver , je ne fais où. Allez chercher le carton de vos devoirs, & dites à Julie & à Poulette de venir, je veux que tout le monde vous enterde. M."^'^ BERTRAND. Ma fille ne comprendra rien à cela. M.'^« GUILLAUME. PardoHnezTraoi > les belles choCes s'entendent toujours. ^ - VALERE. Je fuis de l'avis de Madame , plus il y a de fous , plus on rit. M.»^-: GUILLAUME. "" Safis doute , allons , M. Fanfan , marchez oii je vous dis. Eh ! levez vous donc , nigaud -, on croiroit que vous êtes cloué fur ce fiéîxe. ^ M."^« BERTRAND. AUez, mon cher ami. ii •- FARCE COMIQUE. 45; î^ A N F A N > regardant Madame Bertrand & s en allant. Son cher ami ! qu'elle eft bonne ! M."^« GUILLAUME, criant. Marcheras-tu ? Fanfan s'enfuit. TULLIUS. Si Madame vouloir, j'irois chercher ces Demoifelles. U.^^ GUILLAUME. Reftez , Monfieur Tullius , nous voulons vous avoir, VALERE. II me paroît que M- Tullius eft galant. M.n^-^ GUI LLAUME. Oh ! pour cela non, je vous aifure -, c'cft un homme qui n'en eft pas un , pour la fasçcfle s'entend. T \] LL\\J S , faluant. Madame î M.'"-= GUILLAUME, Il eft d'une modeftie ! TULLIUS,M^«/. Madame ! M."^'^ GUILLAUME. D'une réferve ! TULLIUS. Madame 1 U.^^ GUILLAUME. D'une pudeur î il ofe à peine regarder une femme en facci VALERE. Voyez-vous cela ? TU L L I U S. Faites-moi grâce. Madame, je vous en conjure, vous me fufïbquez par l'abondance de vos éloges- M.^': GUILLAUME. Vous les méritez. Ah ! voici ma bru future. S C E N E X I I. i M.-^^ BERTRAND , M.-= GUILLAUME , JULIE; VALERE , POULETTE , M. TULLIUS. M.'"'^ BERTRAND. Venez, Julie , vous cres furprife de voir ici M. Valere , cependant je compte l'y recenif pendant quelque tems j Pou; lecBe donnez des fiégcs At V È C 0 L t E R^ V A L E R E , i Mie. Vous voye7 , Mademoifelle , que tout fe dirpofe îcî.efi ma faveur, Madame votre mère a la bonté de prendre tout l'intéiêt poffible à ma fortune j voilA Madame Guillaume qui cft devenue en un n^oment la plus zélée de mes amies. M «"«^ GUILLAUME. Oh ! pour cela oui. VALERE. 3*efpere , Mademoifelle , que vous ne ferez point indiffé- tente à la joie que ces évcnemens me caufent. M'"^ BERTRAND. Répondez-donc , Julie- . JULIE. Non , Monfîeur , je ne fuis point indifférente à ce qui pa- roît vous flatter, & vous n'aurez- point à vous plaindre de mes fentimens li ma mère les autorife. SCENEXIII. LES PRÉCÉDRNS ET M. FANFAN, M."'« GUILLAUME. Pl A c E j place , que tout le monde fe range , voici le Li- vre des leçons Monlieur Tullius cherchez ce qu'il faut > ôc faites en forte de bien nous amufer. TULLIUS. Voici, Madame.. . . M. '^ GUILLAUME, interrompant. Mefdames , affons-nou^ tous pour mieux entendre. TULLIUS ,p-éjentant un papier. Voilà , Madame Jvî.me GUILLAUME, /« l^^vant pour tedrejfer M. Fanfan: Tenez- vous droit, mon fils, & préparez- vous à déployer tout votre génie. T U L^L I U S , pré/entant le papier. Voici , Madame. . . M.n^ GUILLAUME. Allons donc , M. Tullius . on n'attend qu'après vous.' TULLIUS. Madame, voilà.. . . M ."^«^ GUILLAUME, iaffeyant. Point de préambule , je vous en prie , je hais les préambu- les , vous favez qulls m'affomment -, allons au fait. T ARC E C OUIQ^UE. 1» M.-« BERTRAND. Vous l'empêchez , Madame Guillaume, foufirez au moins qu'il s'explique. ^ M.'ne GUILLAUME. Eh ! mon Dieu , qu'il dife donc, qu'il parle. TULLIUS Voici , Madame, le dernier exercice de M. votre fils; fi Monfieur veut avoir la bonté d'interroger , mon Difciple aura l'honneur de répondre à M. le plus fuccindtemcnt & le plus cathégoriquemcnt quil lui fera poflible j daignez , Monfieur , ktter les yeux fur ce papier. '^ VALERE. Ou'eft-ce que cet écriteau , Monfieur le Précepteur ? TULLIUS. Ceft , Monfieur, le Compendiûm^ autrement dit VEpîtome ou Programme des queftions relatives à notre exercice. Je vous prie très-humblement , Monfieur , de vous en tenir à ce qui cft écrit pour ne point embarrafler la mémoire de mon Dift ciple. VALERE. Avec plaifir, Monfieur Tullius. HHu M.«"= GUILLAUME. Te bous d'impatience. VALERE. Oh ! il faut le rems à tout , Mefdames-, mais vous allez être contentes. // lit, comment s'appelloit le cheval (T Alexandre* Nous avons l'honneur de le favoir. De quel forme étaient les tré-^ pies £ Apollon ? Cela vous eft égal & à moi auflî ; mais prê- tez attention. Voici , Mefdames , une queflion qui vous in- térefl^e , vous n'aurez pas perdu pour attendre. Qu'ejî-ce que les femmes ? M. Fanfan. M.'"'' GUILLAUME,^ M.Fanfan, Regardcz-donc Monfieur , imbécile. VALERE. Sans doute que vous allez bien faire l'éloge des Dames , car fous la conduite d'un Menror aufîî bien élevé que M. Tullius, vous ne pouvez avoir appris que de très-jolies cho- fes. Allons, voyons, M. Fanfan. Qu'eft ce que les femmes? FANFAN, (funton d'Ecolier. » La femme eft un animal domeftique, malfaifant, traître >3 dans Tes carefTcs , faux dans fes adtions , cruel dans fa haine 3 >» inconftant dans fon attachement. U.^^ GUILLAUME, /tf levant. Qu'cft-ce que vous dites , bstc que vous êtes S :^S VÈCOLIER; F AN F AN. Te dis ce qu*il y a , ma mère- M.'n-^ GUILLAUME. [ Et vous riez , vous , Monficiir Tullius. TULLICJS, fouriant. Madame! M.-"^ GUILLAUME. Voilà une leçon trèsimpert'hente. M."^^ BERTRAND. Elle n'eft pas flatteufc pour le b?au fcxe. TULLIUS. J'en conviens. Madame, mais le Collège étant l'école de la vertu, on ne doit donner aux jeunes gens que des précep- tes très-févcres. M."^^ GUILLAUM E. Votre vertu eft une infolentc. M, Tullius , &" vous méri- teriez que je vous chajje rout-à-1'heure pour vous payer de vos leçons. Au moins , Meldames , foyez bien perfuadées que ce n elc pas ma faute. M.»"- B E R T R A N D. Nous n'en fommes point oifeniées, je vous afTure. V A L E R E. Vous êtes un petft efpiegle , M. Tullius. TU'LhWJSJaluant. Moniîeur. . . . VALERE. Avouez , Monfieur l'Abbé , que c'eft un tour que vous avez voulu faire à Madame Guillaume ? M."^^ GUILLAUME. Je voudrois bien le favoir. VALERE. Tenez , Mefdames , voulez-vous être vengées, allons nous* en faire un tour de promenade, bc laifibns M. Tullius entre les mains de Poulette j elle m'a tout l'air de le ramener bien tôt à réfipifcence, POULETTE. Monfieur , vous me faites honneur, & je me charge avec piailïr de cette commifTion. VALERE. Allons , Mefdames , M. Fanfan donnera la main à Madame Bertrand j je m'empare , moi, de Madame Guillaume. M.'"<: GUILLAUME. Vous êtes charmant, Monfieur, allons, Mefdames, fui- Vons fon avis. Fanfan , donnez la main à Madame Bcrtrraid. VA]LE RE. FARCE CO MIQUE, 4* VALERE. Poulette j on vous rcccmmanù^ M. Tullius. FAN FAN. Oui , mettez- le bien en pé-^itencc, car tout ce que j'ai die eft de lui. La compagnie Jort. a? SCENE XIV. M. TULLIUS, POULET TE, JACQUELINE, POULETTE, à Tullius qui veutfoTtir. xVEsTEZ-là, Mon/îeur Tullius, vous venez de débiter contre le Icxe un libelle diitammatoire qui mérite punition, mais une punition exemplaire. J ACQ.UELINE. Etranglons-ie pour comn.cnccr. POULETTE. Nous pourrons finir par-là \ mais j'ai d'autres defleins au- paravanr. Je vous donne rendez-vous, c.ans cette (aile pen- dant le dîner, M. Tullius -, trouvez-voiis-y , &i Ibyez-y kul » le premJcr venu attendra l'aurre \ venez Jacqueline- Vous m'entendez , mon brave \ dans cette laie pendant le dîner ,54 foy ez-y leul . Elles jonent. SCENE XV. TVLhlOS^feuL H. L t E me donne un rendez-vous , ^' veut eue je m'y trouve leul. Quel efl Ton àc/Tein î Soyer^-y feul. Ces d^vx mors parta- ient mon cccir entre refpér^nce la p'us fiarcule & la crrinte la plus vive. Tendre objet de mon ardeur , vous avez l'ef- prir vindicatif &: le bras vigour "ux î Mai^, iî el'e vo loic ufcrde violence, pourquoi arcendve à lanrôt î Elles étoienc deux > l'avantage du nombre alîuroit m.a défaite. Is'ell-ce pas D 50 V È C 0 L lE Ri plutôr une déclaration ingénienfe qu'elle veut me faire prcf- ientir' Soye^-y Jeul j c'ed'à- dire, j'ai à vous communiquer un aveu que ma modcftic ne me permet pas de confier à d'au- trc-s qu'à vous. Oui , charmante Poulette , c'eft cela que vous voulez m'annonccr, mon cœur vous a entendu j oui, j'y fctai j je mY crois déjà , j'irai , je vous remercierai de vos bontés , je vous. . . . mais. . . . mais foye^-y feul, peut fignifier aulîi que vous voulez me rofTer d'importance j elle choilît fe moment où tout le monde ell occupé du fervice , &: dans ce fallon ifolé , j'aurois beau crier, perfonne ne m'entendroit i quel embarras l quelle perplexité ! l'amour d'un côté, le pé- ril de l'autre; allons, je veux préparer fon cœur à la douceur, par quelques vers tendres & foumis. Dieu du Parnafle , fé- condes mon entrejprife, & toi , Amour, prens pitié de Tul- Jius , & fers de Précepteur au plus foumis de tes Ecoliers. Fin du fécond Aâc, »Vi r A RCE Ç 0 MJ Q_U E, ji ACTE II I. SCENE PREMIERE. ) VALERE, POULETTE. VALERE. 1^ ON, je te dis que je n'ai plus befoin de tes foins, la France » tout va le mieux du monde ; en une heure de prorae» nade avec nos Dames , j'ai fait des merveilles. POULETTE. Diantte 1 quelles font donc ces merveilles ? VALERE. Plus d'obftacles à mon mariage , plus de difficultés j j'ai trouvé un expédient admirable pour terminer cela, je marie Madame Bertrand. POULETTE. A quoi tend cette idée ? Ce merveilleux expcdient cmpêr chera-t-il que Julie n'époufe M. Fanfan? VALERE. Oui, puifque je le marie auffi. POULETTE. Quel homme vous êtes, il vous continuez , vous allez ma- rier tout le Village j mais croyez- vous aufïi que tout le monde veuille fe prêter à vos arrangcmens ? VALERE. S'y prêter, mon ami, ah ! je t'afîure qu'on eft pour mes propofitions, d'une docihtc incomparable. POULETTE. Voilà qui eft merveilleux , efFei5tivemcntj mais ce qui m'é- tonne le plus , c'eft que Madame Bcrtrnnd renonce, comme vous dites, à la fortune que M. Fanfan apportoitdans fa mai- fon en cpoufant Julie. VALERE. Et fi j'ai le fccrct aufli d'aifarcr cette fortune à Madame Dij 51 " V È C 0 L I E R; Bertrand , fans qu'elle prenne M. Fanfan pout gendre » qu6" diias-tu î POULETTE. Je dirai , Monfîeur , que ceft travailler en illuflre rcjctton de Procureur , & que vous êtes bien le fils de votre père -, mais j'ai quelques raifons de craindre que vous ne faiTiez un pas de cierc. • VALERE. Et quelles raifons ? POULETTE. Ah îah ! c eft qu'on dit toujours que bon chien cha/Te de race. VALERE. . Qu'eft-ce à dire , maraut ? POULETTE. Ne nous fâchons pas , Monfîeur , l'événement en décidera-, mais j'apperçois Madame Guillaume. SCENE IL POULETTE, VALERE, M.--^ GUILLAUME. M.'^^ GUILLAUME, à haute voix , en courant. KJ u eft-ce qu'il ell? où eft-ce qu'il fc cache î je ne dîne pas fans mon cher Ecuyer. Ah ! le voilà -, qu'eft-ce donc que vous faites ici ? VALERE. Nous parlions de vous, Madame. xM.'"'^ GUILLAUME. Ceft mal prendre votre tems, on n'abandonne pas les gens qu'on ellimc pour s'amufer à parler d'eux. Nous allons nous mettre à table , mais ce n'crt pas du tout ça que je voulois dite » je vais chafler M. Tullius. VALERE. Pourquoi donc J M.'"' GUILLAUME. Parce qu'il me déplaît : il y a neuf ans qu'il eft chez moi, ça m'cnnviie-, d'ailleurs il m'a manqué, 6» une femme comme moine fe lai£e pas manquer deux fois. Enfin c'cft décide*, j'ai choiiî un Précepteur à mon fils , &: ce Précepteur, c'eft-vous. VALERE. Moi , Madame ! FARCE € O MIQU-E. 55 M " GUILLAUME.* Vous même ; vous avez de i'cfprit , je le vo^s , parce que Marchand cToi^nan Je connoh en cihoulis ; ainfi n'âllçz pas m:* re- furcr 5 car je le veux. Voilà Madame Berrrar-ii qui vous en- gagera à me rendre cefervice, nelt-il pis vrai , Madame Ber- trand. Madami Bertrand entre. S C E N E I 1 1. M.-^ BERTRAND ET LES PRÉCÉDENS. M."^= GUILLAUME. /Tlh ! com.m3 vous êtes fleurie , &: quel ell donc le galimB, qui vous a fait ce cadeau ? M.-'^ BERTRAND. C'efl: M. votre fils. M.'"e GUILLAUME. Quoi I Fanfan ? M.'^eBERTR AND. Lui-même , je trouve Ton bouquet charmant, maisjeïiîis moins flattée de la chofe en elle-même , que de la manière dont il s'y cil pris 5 pour mcTofFrir. ■...„.: M. -"e GUILLAUME. c ^ ... : : '. Ceft étonnarît comme cet enfant-là fc forme -, voilà l'eflêt de votre préfence, M. Valere, vous voyez ce quelle aTpro- duit fur mon fils i il y a deux jours qu'il n'ajtait pas plus penie à cela qu'à s'allemoyer. Oh ! l'on a raiCon de dire ,- ci>-nfb« qui tu hantes, je te dirai qui tu es, 6^ VOUS me refuieriez? Oh i nous verrons. N'eft-il pas vrai , Madame Berrtanii , '^wlil'f ^'-C que Monfieur me polifle Fanfan , qu'il îe rends aimable i M."^'= B E R T R A N D. c --rr' > r- • Monfieur s'en acquitera très-bien. VALERE. Non, Madame» s'il vous plaît -, M. Fanfan do ît.vouS; ap- partenir, &L vous connoiffjz quelqu'un, qui q{\. bcauco-ip mieux en fond que moi pour former un homme aimable, & près de qui l'obéiflance efl: un plaifirfenfible. xM.«-BERTRAND. Voilà encore votre propos de la promenade - mais il fuit dîner. Conduifcz je vous prie , Madame; je rcftj u'i inflanr , avec ia perraiflion, pour donner quelques ordre^ à Poulette. M."^e GUILL AUME. Oui :, oui , ne vous gêntz pas ; allons, donnez-moi le bras Diij 54. V ÉCOLIER, petit obftiné. ©h 1 vous ferez ce que je veux , ou vous trou- verez à qui parler. E SCENE IV. M.^"« BERTRAND, POULETTE. M.»e BERTRAND. COUTEZ, Poulette , je vous crois une fille raifonnable. POULETTE. Au mcins fais-jede mon mieux pour y reflembler. M.-« BERTRAND. Je trouve à M.Valere des qualités eflentielles que je n'avôis pas obfcrvées d'abord ; depuis deux heures qu'il cft dans cette mailbn il a faili des chofes qui m'étonnent , que je n'entrevoyois moi-même, que confufément , ô^ fur Icfquel- les M. TuUiu'ï , tout favant qu'il cft, n'avoit pu acquérir que des notions abdraites. POULETTE. Je le crois bien, Madame, à quoi penfez-vous aufli de confultcr M. Tullius ? Ces vieux pédans ont beau travailler fur certaines matières , ils ne font que tourner autour du potj mais ma foi , vive un jeune Officier pour pénétrer les chofes. M.">' BERTRAND. Cependant tu vas rire de fes idées. Il prétend que je fuis d'âge encore à me remarier , & à fixer k cœur d'un jeune homme. POULETTE. Preuve évidente de fa pénétration. M-"^^ BERTRAND. Tu es donc a ^(îj de cet avis-là? POULETTE. En êtcs-vous facliée , Madame ? aimeriez-vous mieux que je mente ! M.""= BERTRAND. Non. POULETTE. .Quie je vous ^\î^ qu'une femme à rrcnte ans n'cft plus bonne à rien ? . ^,^ M.' «= BERTRAND. Non. POULETTE. Que vous ctes laide à faire peur ? FARCE C 0 Mlt^U B. 55* M."^' BERTRAND. Non. POULETTE. Sans cfpric , rebutante , bé^^ueule ? xM."^^^ BERTRAND. NoH j afTurcment. POULETTE. Eh bien ! cela étant , convenez donc qu'un homme , tel qu'il foit , ne fêta rien d'extraordinaire en vous priant d'ac- ceprcr la fortune &: Ton cœur. ^ M."« BERTRAND. , Voilà précifcment ce que me difoit cet étourdi de Valere> POULETTE. Er oilà ■ juftement aufîi pourquoi vous lui .trouvez , comme moi , beaucoup de mérite êc de pcnétration 5 raaft vous auroit-il par hazard propofe quelqu'un î M."'= BERTRAND. Oh ! le parti le plus incroyable & le plus fingulier. POULETTE. Et c'eft î M.'"*' BERTRAND. Le jeune Ecolier de M- TuUius , M. Fanfan. Il y a de quoi s'étonner \ auffi j'ai plaifanté d'abord fur cette propofition. ^ POULETTE. ; - Mais enfuite , vous aurez traité la chofe plus fériewremeniv M.'"'^ BERTRAND. C'efl: Valere qui infiftoit. POULETTE. Je le penfc bien , & alors vous avez capitulé. M.'"e BERTRAND. Non, j'ai raifonné avec lui. POULETTE. C'eft tout de même, place qui capitule & femme c\vi\ raf- fonnc font a moitié rendues j enfin qu'à répondu Valere à: vos raifonnemens ? "•• ^'■'■''f 2 M.«"= BERTRAND. II m'a ferme la bouche par mille galanteries. J'ai objeclé l'innocence du jeune homme, fon peu d'ufagcjValere a badiné fur mes fcrupules : enfin il m'a démontré tant de convenan- ces dans cette union , que moitié riant , moitié férieufe , ^'ca Ciis venue à lui donner gain de caufe. POULETTE. Je le devinois, le moyen de s'en défendre auffi puifquer vous êtes d'accord iur les convenances , voilà ie mariage fait Div 56 t ÉCOLIER, U, Bi:,RT B AND. Qh ! pas encore , quoique Vah re le foir en,<7agé à me; faire propofcr la chofc par Madame Guillaume , & que je ie très capable de ie déterminer , j'aid'auircs fcrupuies qui m'ar- jêceront. POULETTE. Eft-ce que vous avez peur de ne pas plaire à votre pré- tendu? M.-e BERTRAND. Non, Valcre a f i/î des probabilités a/Fez favorables pour difliper mes doures à ce fujct. J'ai des raifons moi - mê e pour croire à ce jeune homme certains fentimensi mais la railbn exijîe que je ne me décide pas fans des conviôtions pofïtivesj & c'eft au/Ii pom- cela que je me recommatuie à toi- P O U L E T T £. Et que faut-ilque je [aflc ? M/"'= 8 E R T R A N D. II fauïrAifii:,dcsoccafîons favorabUs pour gapncr le jeune homme , & le faire parler à mor fujct, voir ce qu'il penfe i en un mot , (avoir le fccier de (o^^ cœur. POULETTE. Et faut-il que fOus fich'cz cela bicrrôr ? •■', ' M.'"^ BERTRAND. Tu fens bien que des affaires fcrieufes donnent toujours un •peu d'ifS04tlence-, :e n'efl: pas à caufe de moi cai iai, Deu merci, le cœ ir très- libre & trcs-indilî-crent; mais j'ai beibin de cette décilîon pour mririer Julie. POULITTE. Cela s'entefîd , Mndamc, vous n'êtes pas prcfTce ; mais comme on dit x le plutôt fera le mieux M.- B RTR AND. Je m'en rapporre à roi , (î tu me kr?, comme je le fou- haitejtu peux conter fur ma revonroilLatscc. ■ .. ..c,.. . , PO.ULETT t. Ne vous inquiétez pas. Mnd ime E et n and fort. S C.E:.N E V. Pp.U.LET.T.K,,^*^/.. ril. o N maître a raMon , là bonne Dafi- c cfl: par ma foi toute lélpnccj il faur croire qv.e l'a^r de là campagre cfl: di.^blc- bLmcnr cdnt'.gieux pour ■les cœurs déla-uvrés. Tout c<' que je vois ici me fait taire des rcficîxions politiques £c nioraies F ARCE CO M IQ^U E. 57 furie pouvoir lie l'amour, qui mériceroient •'•' foi d'être ir primées \ oui , je me fens autour de la cervelle s Ôc dans ks doigts , des démangeaiCons roiTianefques. Jacqueline entre , 6* Poulette marche avec aflion , en paraïjfant rêver. SCENE VI. JACQUELINE, POULETTE. J ACQ.UELINE,^/^^rr. JLj e voilà juftement feul. ( Haut. ) La France ! POQ LtTTE, marchant fans voir Jacqueline. La dcPcieule h'iloire que cela feroit ! 3 ACQUELINE, le Juivant^ tire une lettre de fa poche* La France ! POULETTE, fans v^ir Jacqueline. Les beaux événemens ! J ACQUELINE, /t fuivant la lettre à la main. Ecoutes-moi donc. ' ■ POULETTE, marchant toujours. Les beaux caraderes ! JACQUELINE, lefuivant. Te niocques-tu de moi ? P O U L E T T £ , »7ûrc/^^/2/. Quel dommage que je ne fois pas Auteur. j ACQÎJELINE,yê mettant au devant. Monficur l'Auteur que l'Enfer confonde, veux -tu bien ni'entcndre , es tu fourd ? POULETTE. Ah ! c'eft toi , Jacqueline i J ACQUELINE, encolere. Je te confeille de t'en apper-. evoir j je fuis là depuis un quart-d'heure. POULETTE. C*e-fl que je revois à un projet , ma charmante -, mais que veux- tu? JACQUELINE. Apprête-toi à rire, & remercie moi. POULETTE. De quoi ? JACQUELINE. Je t'apporte une lettre. POULETTE. De qui? 5« V É C 0 LIE R, JACQUELINE. De M. Tulli : tiens, eile doit être curieufè. POULETTE, prenant la lettre, Que veux-tu que j'en faffe ? JACaUELINE. Eh ! pardi , voir ce qu'elle contient. POULETTE, rendant la leitre. Cela m'efl; impoiîible , mon enfant. * JACQUELINE. Pourquoi donc ? POULETTE. C'efl: que je ne fais pas lire. JACQUELINE. Quoi ! tu fais des projets d'Auteur 5c tu ne fais pas lire? POULETTE. Ma foi , non. JACQUELINE. Pefte de toi ! tu es bien mal appris de mortifier ainfî ma curiofité. N'es- tu pas honteux à ton âge de ne pas feule- ment favoir lire ? POULETTE. Qiiand tu te fâcheras , il n'en fera ni plus ni moins *, ati furpius , fi tu es curieufe , tu as la lettre , il ne tient qu'à toi de te contenter. JACQUELINE. Non j il ne tient pas cà moi , puifque c'efl de l'écriture. POULETTE. Ah! j'entens, c'eft-à-dire , qu'en fait d'ignorance, nous ft'avons rien à nous reprocher. ] ACQUELINE. Qu'appelles tu , infolent , je lis dans l'imprimé , moi. POULETTE. Oh ! dès que tu lis dans riraprimé > c'eft différent j cepen- dant, vois A quoi cela nous avance. J A C QU E L I N E. Qhienne de lettre ! il faut qu'elle vienne me tenter jufte- mcnt quand je n'ai pas de moyen pour en paffer mon envie. POULETTE. En vérité , c'eft dommage , je te trouve à plaindre. JACQUELINE. J'apperçois M. Fanfan qui vient par ici, il va nous tirer d'embarras. POULETTE. Peut-ctre. Fanfan entre. FARCE COMIQl/E. 5^ SCENE VII. M. FANFAN ET LES PRÉCÉDENS. F A N F A N , à part avec humeur. Jl. L L E eft avec cette importune de Jacqueline , je ne pourrai jamais rien lui dire. J A C Q^U E L I N E , allait au devant de M, Fanfan. M. Fanfan, favez-vous lire? F A N F A N j avec humeur. Qu'eft-ce que cela vous fait î JACQUELINE. C'eft que nous avons une lettre à déchiffrer > tenez , exercez vos talens , cela vous amufera- FANFAN. Je ne fuis pas d'humeur à m'amufer ; ainfî déchiffrez votre lettre vous-même , vous aurez un valet de refte. POULETTE. Quoi î M. Fanfan , vous nous rcfufez cette grâce î FANFAN. Si c'eft pour vous, Mademoifelle, je le veux bien, & quoique j'aie refprit occupé d'autre chofe, je ne vous dé-t fobligerai point -, où eft la lettre î JACQUELINE. Tenez , 5c lifez cela très-refpeclueufement , car c'eft de votre Précepteur. FANFAN //■/. A ma toute adorable Se très chère Poulette. [A Poulette. ) Comment, Mademoifelle, M. Tullius vous appelle fatrès- chcre Poulette, (à route adorable? POULETTE. Oh l vous ne voyez rien , il m'a dit des chofes beaucoup plus fîgnifîcatives & plus pafîionnées. FANFAN. Plus paffionnées ? Mademoifelle. J A C QJQ E L I N E. Il ne faut pas qucceVi vous étonne j Votre Précepteur eft un dégourdi qui ne s'en tient pas à la morale du Collège; allez, ïaiffez-le faire j mais continuez votre ledlure ,& voyons ce que chante le dedans de la lettre. FANFAN, ouvrant U lettre. Ce font des vers ! 6o V È C O L 1 E R; POULETTE ET J AC QU EL INE, «/î/S/ni/^. Des vers l F AN FAN. Oui vaiment , écoutez. Vos rigueurs tous les jours augmentent mon martyre, JACaUELINE. Bon , c'eft le commencement d'une chanfon que je fais par cœur. , POULETTE. Laifle. donc lire *, continuez , M. Fantan. FANFAN lu. Vos rigueurs tous les jours augmentent mon martyre , Rien n'eft égal à mon tourment , Cède à l'ardeiir que tu m'infpires. JACQUELINE. Je fais encore celui-U. POUÎ ET TE. Finiras-ru tes remarques. Je vous demande pardon , M. Fanfan , pourfuivez. FANFAN. Je le veux bien j mais qu'elle ne m'interrompe plus, car je lirai tout bas. Cède à l'ardeur que tu m'infpires , Car je fuis un parfait amant. Jacqueline fait la Je ne VOUS écris qu'cn tremblant i , révérence. Jacqueline fait une Catin , calmez votre colère : révérence. Recevez , Reine des Ecrgereî , Jacqueline fait deux Les affurances très-finceres révérences de fuite. Du plus parfait attacliî ment. POULETTE. Es-tu folle , Jacqueline , à qui s'adreffent toutes ces révc- tences ? i. t TARCE COMiqUE. 6è JACQUELINE. A quantité de Meilleurs de ma connoiflance qui viennent de palier. POULETTE. Et où font ces Mefllcurs ? JACQUELINE. Pardi ! les voilà , ce font les vers de M. Tullius -, comme tu m'avois défendu d'interrompre , je n'ai rien voulu dire en les reconnoi flan tj mais à mefure qu'ils ont paiîe je leur ai fait ma polirefle. POULETTE. C'eft à- dire que ce billet-doux eft comme la cafaque de no- tre Bedeau , de pièces 5c de morceaux de quatre ou cinq couleurs , hc fait aux dépens de toute la paroifTe. JACQUELINE. Juftement, & voilà pourquoi M. Tullius feuilletoit tan- tôt des livres d'opéra -, il y a pris ce^ qu'il lui convenoit, & je gagerois qu'il ne s'eft abfenté du dîner , que pour raffembler les rognures fans qu'on s'en apperçût. POULETTE. Cela pourroit bien être; je parie, moi, que M. Tullius a voulu efquiver le rendez- vous que je lui ai donné , en m'é- crivantdcs douceurs, il faut fûrement qu'il s'en tienne quitte, car il n'en parle pas dans fa lettre , &; il n'arrive guerres. JACQUELINE. Laifle-luilc tems, il dinc peut-être. Apres tout il en a be- foin i on ne peut pas toujours s'occuper de fes amours , &: cela fatigue j n'eft-ce pas M. Fanfan î F A N F A N , avec humeur. Je n'en fais rien, Mademoifelle. {A part.) Elle ne s'en ira pas. JACQUELINE. Vous avez donc toujours de l'humeur , M. Fanfan. FANFAN. Oui , & j'en aurai tant que vous ferez ici. J A C QU E L I N E , ien allant. Oh ! fur ce pied-là , ie vous laiifc. FANFAN. • A la bonne heure. J A C QJJ E L 1 N E , revenant. Poulette, fî je trouve M. Tullius, je te l'enverrai. POULETTE. C'efl bon , mais tâches qu'il vienne feulement dans un quart-d'heure. m^ V ECO Ll E R, JACQUELINE, revenant encorei A propos, j'oubliois. F A N F A N , à part , avec colère, C'eft encore elle. JACQUELINE. Donne-moi la lettre. POULETTE. Qu'en veux-tu faire i ] ACQU^LINE, Donne toujours -, je vais ia porter à M. Valerc, pour qu*ii en réjouifîela compagnie aux dépens de ton Pédant •■, c'eft une vraie comédie pour moi de faire pefter quelque nigaud.Adicu, M. Far; fan. Elle fort.- S C E N E V I I r. POULETTE, FANFAN. POULETTE, ^/;ar/. JuA bonne réature. FANFAN.^ Elle eft bien babillarde toujours. J'avois grande impatien- ce qu'elle fut partie. POULETTE. Je m'en fuis apperçu, M. Fanfan, & j'ai pcnfc que vous aviez quelque chofe à me dire. FANFAN, Fanfan naïvement , & tfun ton pajîonné. Oh ! oui , il y a longtems que j'en ai beaucoup à vous confier j mais quand ce vient au moment , la voix me man- que, & je perds la mémoire. POULETTE. Eft-ce pour me faire cette confidence que vous avez quitté la table de fi bonne heure. FANFAN. Non , c'eft qu'il m'eft arrivé un malheur. POULETTE. Vous n'aviez peut-être pas d'appétit FANFAN. J'en avois quand on eft entré dans la falle, & cela auroit continué, fi on m'avoit laifi^e au bout de la table, comme de coutume, mais Monfi'eur Valere qui plaifante toujours, n'a pas plutôt vu entrer votre maîtreffe , qu'il m'a fait mettre pofitivemcni à côté d'elle , en faifant une quantité de com- FARCE C 0 M IÇll/£. (Tjf plimens fur un bouquet , dont j'ai fait préfent à Madame, POULETTE. Et ces complimens vous ont-ils fait du chagrin? FANFAN. Au contraire , j'en étois bien aife , mais à force de les en* tendre répéter, ils m'ont déconcerté. Madame votre maî- trefîè a voulu me raiTurer , & elle m'a pris la main j alors mon tremblement a redoublé , mon cœur s'eft mis à palpicer, j'ai levé les yeux pour me diftraire •, point dutout , j'ai rencon- tré ceux de Madame. POULETTE. Et cette rencontre vous a ôtè l'appétit? FANFAN. Hélas ! oui , Tenez , ma chcie Demoifelle , j'ai lu dans mes livres quelques defcriptions de l'amour, que M. Tjllius me faifoit pafTer , parce qu'il difoit qu'il y avoit dumal. Je crois que j'ai eaené ce mal-là. POULETTE. Bon 1 n'avcz-vous pas lu auiïi dans vos livres , quel cft U remède pour cette maladie î FANFAN. Non, mais j'ai toujours penfé à vous le demander. POULETTE. Et pourquoi me choiiir pour cela , n'avez*vous pas votre Précepteur ? FANFAN. Il m'a toujours trompé , Mademoifelle -, d'ailleurs il eft trufque &c mauflade, vous êtes bonne de complaifante , vous- Dites-moi, eft-il vrai que le mariage pourroit me foulagerJ POULETTE. Mais oui , le mariage eft un fpécifiquc qu'on emploie d'or- dinaire pour les maladies défefpérées , & qui opère le plus fouvent des guèrifons radicales. FANFAN, avec vivacitL Si cela eft, tâchez que M. Valere engage raa mère .-i me procurer ce remède , car mon mal eft défefpéré. POULETTE. Et bien , votre merc eft déjà toute difpofce à ce que vous defirez,puifqu'ondoit vous marier inceflamment à Mademoi- felle Julie. FANFAN, très-vivement. Ah ! qu*on n*en fafTe rien , Mademoifelle , qu'on n'en faife rienj cela ne ferviroit qu'à me rendre plus maigre» POULETTE, Pourquoi donc î t4 V È CO II E r; F A N F A N , naïvement Parce que ce n'eft poinr Madcmoifelle Tulie que j'aime» POULh-TTE. Ah ! ah ! vous.favez donc que le mariage n'eft un vrai fou- lagement qu'avec la perlbnnc qu'on aime? F A N F A N. Je ne le fais point , mais j'ai lieu de le penfer. N'ai-je pas vu marier des Pigeons , des , crins, on n'allemble pas ceux quife fuient» mais bien ce ux qui ic cherchent. POULtTTF. Savez-vous que vos obiervations vous ont mené loin, M. Fanfan, FANFAN. Oh ! je f^is bien que je luis un ignorant -, mais ces chofes- là parlent toutes feules, Madcmoifelle, il ne faut que finf- tinct pour s'en appert evoir. POULETTE. Votre inftinâ: n'eft pascuipe, je vous aflure, croyez qu'il vous mènera plus droit au but que tous les confeils du monde. FANFAN, d'un ton plus élevé. Ce qui me fâche, c'eft qu'on ne puilTe pas fe marier à deux perfonncs tout à la fois. POULETTE. Diantre ! il me femble que l'appétit commence à vous re- venir , & que feriez- vous donc li cela étoir permis ? FANFAN, d'un ton de confidence Tenez, je prendrois Madcmoifelle Julie en mariage pour faire plaifir à ma mère , & j'en prenorois une , que je fais bien, pour me faire plaifir à moi-même. POULETTE. Oui-da, les heurcufcs difpof rions! quel dommage qu on ne vous laiflepas la bride fur lé col, ôc quelle eft cette autre qui vous feroit tant de plailîr î FANFAN. Je n'ofe pas vous le dire , devinez. POULETTE. Eft-ce moi? FANFAN. Ah ! non , je n'aime pas tant Jacqueline &: Madcmoifelle Julie que vous; mais leur vue me caufe une certaine impref- iion que vous ne m'avez jamais faite. POULETTE. Cela fe peut bien-, cependant malgré la certaine imprei- fion, Jacqueline t*?c Julie ne font pas encore celles qui vous feroicnt tant de plailir. . v, x> a ^t F A N f A N. TARCE COMICIVE: %^ FANFAN. Non: POULETTE. En ce cas 3 je ne vois plus que ma maîtrefle , à moins que... F A N F A N 5 très-vivement. N'en nomraez pas d'autres , Mademoifelle. POULETTE. Qiioi ! c'eft Madame Bertrand que vous aimez , la mère ^e Julie î F A N F A N j avec beaucoup (faêîion. Oui , Mademoifelle , je n'ai pas pu m'en empêcher , mais n'en dites rien à mon Précepteur , car c'eft pour cela que je craignois de vous révéler mon fecret, n'en abufez point , con- fiez mon malheur à votre maïtrcfle feule j dites-lui que j'ai fait tout mon polTible pour ne pas l'aimer , que je lui de- mande pardon de mon audace, mais qu'elle elt involontaire > & qu'il me feroit plus aifé de mourir , que de m'en défaire. l'OULETTE, àpart. Cela va le mieux du monde. { Haut. ) Allez , Monfieur Fan- fan, confolez-vous, ôc foyez fur que ma maitrefle n'eft pas femme à vous laifler mourir faute d'afTiftance. FANFAN. Le croyez-vous, ma chère Demoifelle. Ah ! que vous me Faites plaifirj mais ne me flattez-vous pas? Courrez vite vous en affurer. POULETTE. Quoi ! tout-à-lheure î FANFAN. Oui , ne différez point , allez , je vous en prie , & revenei avec promptitude , car je me meurs d'impatience. POULETTE. Comme l'inftinil donne de l'éloquence ; reftez donc ici, Monfieur Fanfan , je vous promets de faire votre commifïion , & de vous apporter de bonnes nouvelles. O nature ! amour ! vous déconcerteriez ma foi tous les Précepteurs du monde. lljbrt. S C E N E I X. FANFAN feul , d'un ton de contentement. Ah ! que e fuis foulage l ce fecret me pefoit fur le coeur ; depuis l'aveu que je viens d'en faire , il me paroît que je fuis tout autre , je refpire plus libre^ient, je me fens plus gai j il £ puvois voir ce que c'eft avant de le furprendre. , ;•::- J F A N F A N , écrivant avec attention.. » Oui, je vous jure une ardeur éternelle. TULLIUS, J/;^rr. Unéartfetir étemelle ! il n'eft plus occupé d'autre chofej-Ic libertin, il r examine. Comme Ton vifage eft animé. FANFAN, cèf'ant d'éàrirc un moment , 6- regardant fa lettre. »:> Oui, obligeante Poulette, TULLIUS, àpart. ■< Ujigpme mon ingrate. FANFAN. - . »» Oui, je me félicite de tout , fi vous me tenez parole. . '3PARCE COUK^UÈ, ^7 T U L L I U S , àfaru Si elle lui tient parole, elle lui a donc promis quelque chofe, la traîtrefFe? .... Que je fuis malheureux ! Funfan continue décrire. Le petit fcélérat ! . . . avec quelle aélivité il griffonne la chienne de lettre, bï je me croyois mais non la prudence exige que je ne paroifTe qu'avec les attributs de mon autorité. . . . attens , je vais revenir. SCENE XI. FANFAN,/^^//. J AI heureufement terminé fans être interrompu, je ne fais ii mes vers font bons , mais je n'ai jamais eu tant de plai/îr 3 ni tant de facilité pour écrire j plions ma lettre. S C E N E XII. FANFAN, TULLIUS, avec une poignée de verges & une férule qu il cache, TULLIUS, àpan. X L eft encore occupé -, cachons mes armes. F A N F A N 3 fans voir Tullius, Mais Poulette ne vient point- TULLIUS. Non , mais me voici , moi. F A N F A N cachant fa leurt^ Ah ciel ! m'auroit-il épié ? TULLIUS. Que voulez-vous à Poulette ? F A N F A N , timîdemenU Rien du tout, Monfieur. TULLIUS. Comment, ricnî Et quel eft ce papier que vous avez (erré dans votre poche quand vous m'avez apperçuî F A N F A N , timidement. Ceft mon mouchoir, M. Tullius, regardez plutôt. // tire fan mouchoir de fa poche. TULLIUS. Et ces autres papiers que voilà par terre, font-ce aufîi vos mouchoirs ? Répondez. . . . vous êtes un impofteur \ voilà £ ij 6S V È C O L I E R, votre écritoire Air la table , qui prouve votre menfongc ^ montrez-moi la lettre que vous avez écrite. F'ANF AN, à part. Je me fens hors de moi , fa perfecution me révolte, j T U I- L I US avec autorité.. Eh bien ! à qui eft-ce que je parle ? FANFAN. Mais , Monfieur. . .'. TULLIUSj très -emporté & menaçant. Je veux voir cette lettre , & tout-à-l*heure , retournez , poches. FANFAN. Pourquoi donc , s'il vous plaît ? TULLIUS. Pas tant de raifons , retournez vos poches j je le veux. FANFAN} d'un ton d'impatience. Vous le voulez, ( à part ) le feu me monte au vifage. TULLIUS. Ohéirez-vous ? FANFAN, après l'avoir regardé de côté en filence , 6* mettant fon chapeau. Non» je ne vous obéirai pas. TULLIUS. Tu ne m'obéiras pas , petit impudent ' eh bien , regardes ces verges qui te font deftinées ^ fî tu as l'audace de me rélifter « je te donne cent coups d'étrivieres dans cette place. FANFAN. Ne vous y jouez pas, M. Tullius , ou bien.... TULLIUS, furieux. Tu ofes me menacer. // veut avancer. FANFAN, avançant de fon coté. N'approchez pas, je vous dis , j'ai de l'humeur &: plus de force que vous; éc fi vous faites le moindre mouvement avec votre balai , je vous étrangle fur la place. TULLIUS, laiffant tomber fes verges & fa férule. Les armes tombent de mes mains & la furprife m'ôtc la force de lui répondre , je ne le connois plus. FANFAN. Je me connois bien, moi. Ce n'eft plus à mon âge qu'on doit craindre les étriviercs ni les Précepteurs*, vo s m'en avez fait aflez, M. Tullius, croyez moi, rengainez pour toujours vos complimens , & rcmerciez-moi de ma modé- ration. TULLIUS, avec fentiment. Petit ingrat ! voilà donc comme vous payez les foins pa- ernels que j'ai pris de vous depuis neuf arniées. FARCE C0MIQ17Ë: €^ F A N F A N fièrement. Beaux foins vraiment , je vous conleille de m'en faire un reproche-, li je ne fuis qu'un idior , à qui en ai-je l^obliga- tion ? Qu'eft-ce qui m'a fait apprendre par cœur ces foctifes que j'ai récitées tantôt devant la compagnie. Allez , Mon- iteur TuUius , portez vos leçons aux Marmcnizets , ma raifon èc mon cœur m'en oTit donné depuis peu, qui valent mieux que toutes les vôtres. T U L L I U S , avec aigreur. Cefont vos pafîions qui vous dominent, petit îibertin , & non pas votre raifon ; mais votre mère fera inftruite de vos fredaines. F A N F A N 5 ironiquement. Prenez garde vous-même que je ne Mnftruife des vôtres. T U L L I U S. Hé î que lui direz- vous 2 F A N F A N , qui s'approcht. Tenez, demandez à Poulette j elle a vu de vos vers, & me les a fait lire, demandez lui ce qu'elle en penfe î TULLIUS. Je fuis confondu. SCENE XIII. POULETTE ET LES PRÉCÉDENS^ POULETTE. V^ u ' E s T-ce que c'efl: donc , Meffieurs , vous parlez bien haut î Vous êtes tout échauffë , M . Fanfan , eft'Cc que votre Précepteur vous apprend quelque nouvel exercice. FANFAN} toujours avec ironie. Non , Mademoifelle , c'eft moi qui lui en fiir fourenir un bon. Se je ne crois pas qu'il ait jamais envie de revenir à mon école \ mais rendez-moi compte de votre mefiage» Qu'avez-vous à m'apprendre î POULETTE. Tout vous eft favorable ; Madame votre mère eft clte-mê- me à préfent à plaider votre caufe, & vous attend au falloa avec ma maître'fle & la compagnie. FANFAI^, tranfporti. Quoi ! j'aurai en mariage. . . . POULETTE. Allez , je me trompe fort , ou vous ne tarderez pas à? être le maître ici de routes ies manières. E ii; ^Q : ^ V È C O L I E R; F A N F A N , faute au col de Poulette. Que je vous embra/lc, ma chère bonne amie, je ne me fens pas de joie. // rembrajfe encore. Encore une fois, que je vous ai d'obligation... . à Tullrus qui le regarde Ne faites point de grimace , M. Tullius , je ne crains plus perfonnc. TULLIUS, dun ton pédantefque. [O pervcrtiflcment afireux ! F A N F A N , avec ironie. Faites meilleure mine à votre adorable, fi vous la voulez en mariage \ allez, mon cher Précepteur, ne diflimulez plus "vosTentimens -, mais fouvenez-vous auffi qu'on perd tôt ou tard Ton latin à gêner ceux des autres. Il prend la main de Pou- lette. Au revoir, ma bonne amie Poulette. . . . en lui ferrant la main, au revoir. ... au revoir, ma bonne amie. SCENE XIV. POULETTE, TULLIUS. TULLIUS. JVIàlheureux que je fuis ! ma préfence même ne les gêne plus. POULETTE, à part. Achevons de le défoler. ( Haut , 6* avec douceur) M. Tullius, c'eft à nous deux à préfent, nous fommes feuls , il s'agit d'en découdre. TULLIUS. Et que voulez-vous encore, phénomène d'ingratitude, après les outrages que vous caufez à ma tendrefïe \ n'êtes- vous pas fatisfaite ? POULETTE, tranquillement. Point de verbiages , s'il vous plaît , les momens font pré- cieux , vous devez une réparation aux Dames , pour les inju- res que vous avez fait débiter contre elles par M. Fanfan. Vuidons cette affaire bien vîte. TULLIUS. Pouvez-vons pb.ifanrer encore ? POULETTE, «« />«« pltis vivement. Comment ventreblcu , vous croyez que je piaifante. Ah ! vous allez voir fi je fuis une femme à plaifanter (Reprenant le ton indifférent. ) Tcncz , M. TuUius , voici deux piftokcs chat' gés de trois balles chacun , & bien amorcés, IJJLhlUS.efrayé. Ah Ciel » FARCE COMIQt/Ê, yi POU.LETTh. Prenez-en un» M. Tull'us je vous lai'ic le choix- T U L L I U S. Et que voulez- vous que i'en faite? POULETTE. La belle demande ! cft-ce que vous ne lavez pas à quoi cela fertf Prenez, vous dis-je , & que cela fe pafie doucement; il faut que l'un de nous deux fafle fauter la cetvelie à l'autre; voila tout. TULLIUS, cfrayé. Jnftes Dieux ! voilà tout. Eft-ce que vous comptez cela pour rien ? POULETTE. Comment ! vous héikcz? Une bagatelle fembîable vous épouvante ? Allons, M. Tullius , point demauvaifesraifons» expédions, je vous prie, car j'ai aiî^ire, TULLIUS. Mais eft-il bien poffiMe que vous ayez formé réellement un delfein aulH barbare. • POULETTE. Encore des raifonnemcns. ( d'un ton d'amitié. ) Tenez , parlons franchement , eft-ce que vous avez peur? TULLIUS. A vous dire vrai , Mademoifelle , vorre démarche a quel- que chofe d'étrange , & qui me glace d'horreur. POULETTE. C^enediliez vous d'abord. Je ne puis pas deviner votre goût, moi; allons, puifqu'il faut vous traiter en poltron , voici juftement des armes qui vous conviennent. ( EUc ramajfe lafirule.) Mettez- VOUS à genoux , M- Tullius. T^ULLIUS. Quoi j vous voudriez ! . . . POULETTE. A genoux, vous dis- je, ou prenez les piftolets , iî vo\fs l'aimez mieux , je vous laifîe encore le choix. TULLIU S.àpart. Quelle perplexité ! POULETTE. Eh bien ! TULLIUS. • Me voilà à vos genou r. POULETTE. C'eft bon. ( A part, ) s'il pouvoir venir quelqu'un , f à Tul- lius. ) Tendez votre main , que je vous ^onne une férule pour commencer. Eiv fjï r È C 0 L 1 E r; TULL lus. Quoi I . . . POULETTE. Tendez-donc , ou je reviens au piftoiet. T U L L I U S , tendant la main. Où fuis-je réduit. // reçoit une férule. POULETTE. ■L'autre main. TULLIUS. J'entens du monde , Madcmoifelie. Il veut fe relever, POULETTE. Remettez- vous , ou bien. . . . SCENE XV. JACQUELINE ET LES PRÉCÉDENS. 3 A C Q^U E L I N E , dans le fond du Théâtre en éclatant de rire. Ah ! qu'eft-ce que je vois , M. Tuilius en pénitence > &: Poulette qui fait l'ccolc. POULETTE. Approchez j Jacqueline, vous n'êtes pas de trop. Mon- sieur fait une réparation auf'^xe , qui vous regarde plus que moi i vous voulez bien permettre qu'il continue. JACQUELINE, nant. Oh ! de tout mon cœur , j'aime à voir M. Tuilius dans cette pofture ; il a une figure route drôle. POULETTE. Répétez, Monfieur , le compliment que je vais vous dire: 'Mefdemoifelles , je fuis un nigaud ; allons donc TU 1 L I U S , entre fes dents, Mefdemoifelles, {il s'arrête & dit à Poulette) pouvez-vous me contraindre jufqu'àce point ! JACaU£,LINE. Pardi ! vous avez bien de la peine à dire que vous êtes un nigaud , allons donc, eft-ce qu'on ne fait pas ce qui en eft ? POULETTE, prenant le piflolet. Finiflbns-nous ? TULLIUS, à part. 11 faut s'y réfoudre. ( Haut ) Mefdemoifelles , je fuis un ni- gaud. POULETTE, remettant les pijlolets à JacqueRne, Bon : Je demande pardon aux Dames de mes fottes leçons. TUL lUS. Je demande pardon aux Dames de mes fottes leçons. FARCE COMIQUE. 7f POULETTE. Fort bien , M. TuUius, il n'y a plus que courage à prendre : Ef yc leurs promets bien, TULLIUS. Et je leurs promets bien. POULETTE. De ne jamais parler (Telles , ni en bien , ni en mat. TULLIUS. De ne jamais parler d'elles , ni en bien, ni en mal. POULETTE. A merveille. Mademoifelle Jacqueline va finir la cérémo- nie , & tout fera dit. Tenez , Jacqueline > voilà mes armes j ayez la bonté de donner deux férules à Monfieur. J A C au E L I N E. Oh ! avec plaifîr 5 tendez , M Tullius, tendez donc. TULLIUS. Cruelle Poulette , n'eft-ce pas affez de vous ! POULETTE, d'un ton de pédant, ' Soumettez-vous. J A C Q^U E L I N E , /"i prenant la main. Allons , en voilà une , vite à l'autre , elle lui prend l'autre main, en voilà deux ; pardi ! jy prens goût ; Poulette , ordonne encore quelque chofe. POULETTE. C'efl: aflez , relevez- vous, M. Tullius, & vous , Jacque- line , allez inftruire la compagnie de la docilité de Monfieur.; TULLIUS, courant à elle. PouiTeriez-vous la vengeance jufques-là , barbare. POULETTE. N'ayez point de fcrupule là-deflus , M. Tullius, il efî: moins humiliant d'avouer fes erreurs que d'y perlifter. TULLIUS. Si cela fe fait , cruelle , je fuis de cette maifon pour n'y jamais rentrer. JACQUELINE. Eh mais, c'eft: un parti qu'il faudra toujours que vous pre- niez , quand nous ne dirions mot. TULLIUS. Pourquoi donc ? JACQUELINE. Parce qu'on vous chalfe. ... TULLIUS. Qu'efl-ce à dire ? JACQ_UELINE. Cela veut dire que ma maîtrefîe , auill fcandalifée que nom jde 1 éducation de M. Fanfan Se de fon exercice» ne veut plus 74 V ÈCOLI ER, de vous pour l^'inflruire. Voilà un effet de cinquante piftolcs, dont elle récompcnfe vos rcrvices> en vous continuant cha- que année les appointemens que vous aviez chez elle. T U L L I U S. Eft-il pofïible qu'on me conjîèdie ! POULETTE. En effet , il efl: douloureux qu'on ne vous laiflfe pas régenter M. Fanfan jufqu'à fa cinquantaine ; cela cft trifte, TULLIUS. Après tout ce que j'ai fait ! J ACQUELINE. Je vous plains aufîî , en vérité -, cependant je vais rendre compte de macommifîîon, & vous fouhairc un bon voyage-, fî par hazard vous aviez encore befcin de quelques férules avant de partir , ne vous en faites pas de faute ■> &: fouvenez- vous, M. Tullius , que je fuis toujours à votre fervice. Adieu M. Tullius. SCENE XVI. TULLIUS, POULETTE. TULLIUS. x^ u E d'avantures l'une f.ir l'autre ! que de mortifications ! Poulette, d'un ton de regret. Si bien donc , M. Tullius , que nous allons vous perdre ? j'en fuis réellement fâchée , car votre éducation m'amufoit •, j'aurois fais fûrement quelque chofe de vous. TULLIUS, pathétiquement. Voilà ce que je démandois ingrate /& vous n'avez eu pour moi que des mépris «Se des rigueurs *, mais il efl: encore tems j voilà cinquante pifl:oles fans mes épargnes, qui font honnêtes , & la pcnf on qu'on me conferve -, dites feulement un mot, & Tullius fe donne à vous pvcc toute fa fortune. POULETTE, tendrement. Gardez votre magot, M. Tullius, je vous affûte qu'il ne m'cft pa*; poffible d'accepter un mari j fut-il un Prince, je le rcfuferois. TULLIUS. J'approuve votre délicateffe , elle s'accorde avec mes /en- timens, mais ce n'eft pas non plus un mari que je vous pro- po!"c*, non , belle Poulcrtc , les liens du mariage font tiranni- ques pour la vertu, & conrradidïo''-es à la nature. POULETTE. Ah l ah ! que me propofez-vous donc ? FARCE COMIQUE, 75 T U L L I U S 5 d'un ton précieux. Un amant fournis & tendre , auquel vous ne ferez attaché que par ce feul bc doux fentiment que le goût fait naître , que le plaifir entretient , &c que la liberté rend durable. POULETTE. Ouida? Monfîeur le Doclcur , mais il me paroît que vous avez une morale aflez crouftilieufe- T U L L 1 U S , vivement. Plût au ciel , ma chère , quelle devînt à la mode ! POULETTE. Mais oui , je vous dis, la fagefle & l'honneur ne lailTeroient pas d'y trouver leur compte. T U L L I U S , précipitamment. N'en doutez point , belle Poulette , la fagefle coniifte à don- ner fon cœur quand un honnête homme le demande \ mais c'cH: un crime de le mal placer. POULETTE. Sont-ce là les leçons que vous donnez à vos Difciples ? TULLIUS. Il n'eft pas queftion de mes difciples, on a des maximes avec eux qui ne font pas faites pour les grandes perfonnes. Vous êtes aufli charmante que je fuis honnête-homme, c'cft pour cela que je vous diftinguej oubliez le goût paflager qu'un petit fot vous infpire, & qui finiroit par vous perdre. Le moiDcnt nous eft cher , prononcez ma fentence, décidez, belle Poulette, de ma vie ou de ma mort. POULETTE, ironiquemenr. Vous mériteriez, Monfîeur l'honnête-hommc, que je vous accorde le dernier, ^ que je vous aflbmme fur la place -, je devinois bien que vous étiez un imbécile , mais je ne vous croyois pas impolteur, ni libertin , & vous m'apprenez que ces qualités peuvent fe trouver enfemble. TULLIUS, tendrement. Vous m'infultez , besuté brutale. POULETTE. Monfîeur le Docleur, prenez garde que vos com.phmens ne vous attirent encore nne corredion avant votre départ -, tenez , je m'y fens difpofve , & la main me démange comme tous les diables. TULLIUS. Eh bien ! cruelle, fatisfai tes- vous; j'obéifioîs tantôt à vos ordres en me profternant i vos pieds , m'y voilà de mon plein gtè , pour vous demander grâce, pitié, miiéricorde, La compagnie entre & refie au fond du Théâtre ; VuUre empêche qiton navanu. 7$ V È C 0 L I E RI SCENE XVI L VALERE , JULIE, M."- B ERTR A ND , M.- GUILLAUME, JACQUELINE, ^^/w le fond du Théâtre. TULLIUS, à genoux devant Poulette fur le devant de la Scène. POULETTE, VALERE, dans le fond du Théâtre. i o I N T de bruit , Mefdames , le tableau eft intéreflant. TULLlU.S,<î genouxprenant amoureufemeitt la main de Poulette. Vous ne répondez oint, vous détournez la vue. Eft-ce mépris ? Eft-ce tendrcfle î M'aimcz-vous ? Partirons-nous en- femble ? - POULETTE. Ma foi j je n'en fais rien , mais demandons. ( ilfe tourne vers le fond du Théâtre. ) Qu'en dit la compagnie? TULLiUSj appercevant tout le monde , fe levé en s' écriant. Ah ! je fuis perdu. VALERE. Il ne falloit pas vous déranger, M. l'Abbé, ces Dames prenoient un plaifir infini à vous voir fi calant. M.- GUILLAUME. Comment donc , M. Tullius , vous ne m'aviez pas dit cela : tredame comme vous êtes pafTionné. POULETTE. Monfieur m'a donné de l'ouvrage , Mefdames j il falloit pour lui réfifter une vertu comme la mienne. F A N F A N , ironiquement. Courage donc , M. Tullius , vous ne dires mot. TULLIUS, d'un ton de pédant. Vous avez \\x ma foiblefr,' , Mefdames , mais le Sage n'en cft point exemt , les plus fameux Héros ont fléchi comme moi fous le joug de l'amour -, l'antiquirè fait mention partout de la jupe d'Achile &: du fufeau d'Hercule. M.^^GUILLAUME. Il n'eft point ici queftion d'antiquité ni de cotillon , vous êtes un fot j je vous ai fait congédier , ainfi allez vous en. TULLIUS, refpeâlueufement. Je n'ai plus qu'un mot à dire. Madame , je brûle pour les charmes de l'inflexible Poulette, le fort en eft jette, &C je mets tout mon bonheur à l'obtenir en mariage. T'A RC E C 0 MI(IU E, 7/ POULETTE. Mefdames , c'efl: à vous que j'ai cette obligation , car Mon^ fcur me failbit tout-à-l'heure des propoficions ipoins honnêtes; JACQUELINE. Honnête ou non , je m'y oppofe , ôc toute la compagnie fait que j'en ai le droit. TUL LI US, vmm^/ir. Et quel droit s'il vous plaît ? JACCLUELINE. C'efl que je l'époufe. TULLIUS. Quiî » JACQUELINE. La France. TULLIUS. Qu'eft-ce que cela me fait, votre la France n'a rien de commun avec mon mariage. V A L E R E. Pardonnez-moi , Monfîeur , Tobjet de votre tendre/Te , l'in- flexible Poulette que vous adorez , eft la France , mon Valet. TULLIUS. Oh ciel ! V A L E R E. Il fe trouve femme de charge ici par des raifons que^'ces Dames favent depuis mon arrivée ; & votre méprife , en] les amufant , a fervi a me faire pardonner cette fupercheric. TULLIUS. Quoi ! Monfîeur, vous me trahiflez auffi? V A L E R E. Ma foi oui, Monfîeur Tulhus , je n'ai eu garde de faire c^Ç- fer le divertifTement ; car vous faifiez votre rôle fî parfaite- ment , que je me ferois fait ennemi de tout le monde en vous tirant d'erreur. M.'^«= BERTRAND. Ne vous plaignez point de cette plaifanterie , M. Tullius; vosbnifqueries pour votre Difciple méritoient au moins cette mortification-, vous n'étiez pas vous-même, aflez irrépro- chable pour être auffi rigide envers les autres. Que cela vous ferve de leçon. FANFAN. Et qu'il ne s'avife plus d'en donner. TULLIUS, irme'. On vous foutient , petit impudent , on vous afiranchiC du joug , mais j'avertis votre mère d'y prendre garde, M."^'^ GUILLAUME. Je fais ce que j'ai à faire , Moniïeur, «TA V ECO LIE R^ TULLIUS. Je le croîs , Madame , mais vous ne favez pas que j'ai Cùt* pris ce libertin écrivant des billets-doux à ce même fripon déguifé. F A N F A N.^ ^ C'effc encore une de vos erreurs- Si j'aiécrit,ce n'étoit point à Poulette. Voici ces vers qui vous ont tant occupé j tenez, Monfieur Valere, lifez-les tout haut, je n'en rougirai pas; mais vous avez un échantillon de la poéfie de M^Tullius, léffalez-en la compagnie. TULLIUS. Quoi ! mes vers. ... VALERE. Sont entre mes mains. Moniteur, c'eft un hommage â Poulette, dont ces Dames ont beaucoup ri je vous aflure. M. <= GUILLAUME. Cela eft vrai , Madame Bertrand & fa fille difent qu'ils ne valent rien , moi je les trouve pitovables; ainli voilà qui eft fini. Voyons ceux de mon fils , je fuis ravie d'avoir un Poète . dans ma famille. VALERE. Quoi ! M. Tullius , vous vous retirez ? M.'^'^ GUILLAUME. Je voudrois bien voir qu'il s'en allât; Monfieur, vous ne partirez qu'après avoir entendu les. vers de mon fils; j'ai écouté les vôtres, ainfi reftez , ou je vous dépenfionne. VALERE. Allons , Monfieur Tullius , ne rifquez point d'être dépen* ftonné. Mefdames, foyez attentives, je vais lue les vers de famille -, Monfieur Fanfan excufera fi je ne m'en acquitte pas bien. FANFAN naïvement. Oh î hfez comme vous voudrez , je n'ai point mis d'art pour les faire , il n'en faut pas pour les lire. V A L E R E /i/. * Heureux le jour , & le mois , & l'année , Et la faifon , & l'heure , & le moment j Heureux encore la raaifon fortunée Où j'ai brûlé pour Madame Bertrand. Vous voyez bien > M. Tullius, que ce n'eft point à Poulette, M.'"« GUlLLAUMEj avec impatience. Continuez donc. Heureux cent fois le doux faifilTeraent , * Jmiti du quarMie-fe^titme Sonutt dt Ptimrque. BcncdcttO ÛX *1 giomo ç '1 mcfc c l'anno. ' ^'ARCE COMIQUE. <7j Qui me ravit quanJ je la vois fourire j Heureux ce mal qui me Semble charmant," Et qui m'enchante en caufant mon martyre.' M.i^^ GUILLAUME, tranfportée. La jolie penfée ! , Heureux les jnots que ma main a tracés Pour attacher les regards de ma belle j Heureux aufll les pleurs que j'ai verfcsj M.'"= GUILLAUME. Que cela efl: tendre ! » Oui , je lui jure une ardeur éternelle : Si cet aveu trouve grâce auprès d'elle. Heureux mon coeur , tous Tes maux font pafTés M.n^<= GUILLAUME. Charmant , divin , délicieux ! VAL&RE. Eh bienjMefdames. M."^« BERTRAND. Donnez-moi c|^ vers , Monfieur , ils juftifîent l'idée que i'avois de M. Fanfan , &: le confentement que j'ai accordé aux propolîtions de Madame fa mère. F A N F A N > tendrement & avec naïveté'. s Ah ! ma belle Dame , 'Votre contentement me vaut tous les éloges, &c mon efprit efl: votre bien , car fans vous, je m'ignorerois encore. ' . M.'"^ BERTRAND, i Julie, Que dites-vous de ces vers , ma fille î JULIE. Mon attention pour celui qui lifoit, m'a fait oublier l'éloge de l'ouvrage. V A L E R E Je vous fais gré de cette diftracftion, Mademoifelle, Si" l'Auteur n'y perd rien; mais Madame Guillaume efl: toute rêveufe. M."ie GUILLAUME, revehara à elle. C'efl: de plaifir , mon cher Monfieur , j'écoutois vos-com- plimens à mon Fanfan , je reftois en extafe , car il n'en a ja- mais tant reçu. ( avec tranfport^ courant à [on fils les bras ouverts. ) Embralfe ta mère tnon garçon , tu as de l'efprit , &: ton Pré- cepteur n'efl: qu'une bête -, embraffe aufll ta ptétendue. FANFAN. Oh ! de tout mon cœur , mais je n'ofe pas qu elle ne me le permette. M.n^e GUILLAUME. Et vas, nigaud 5 ell-ce que tout ii'ell pas permis à un mari. S& VÈCOLIER, FARCE COMIQrt. FANFAN Oh ! puifque touteft permis. { Ill'embraffe. ) Quel plaifir S allez, ma belle Dame, vous n'en êtes pas quitte pour celui-ci , & je feus qu'avant qu'il foit peu , je vous en demanderai bien d'autres. M.n^-^ GUILLAUME. Mes enfans » ce n'eft pas de ça qu'il s'agit, le vin efi tiré .faut le boire ; mettons les fers au feu , il ne faut pas tant de heure pour faire un quarteron. Voila trois mariages à faire j fî vous avez un No- taire ici qu'on l'aille quérir, finon qu'on aille autre part r en faut un -, qu'on dreiTe tous les contrats ,à la fois , & que tout foit baclè avant ce foir. VALERE. Pour moi, jefiiis de l'avis de Madame Guillaume. POULETTf. Et moi aulTi. M.'"'' GUILLAUME. Eh bien , ma brue, qu'en dites vous ? M.f"'^ BERTRAND. Je vous laifTe la maîtrelTe , Madame, mais je vous demande une grâce. M."'= GUILLAUME, précipitamment. Voyons vite , qu'eft-ce que c'eft, parlez , je vous l'accorde. M.«>'=BERTRANp. Je defirerois que M. TuUius ne partît point encore; il a des difpofîtions pour le mariage , &: je connois un parti qui lui conviendroit. M."^'= GUILLAUME, toujours précipitamment. Oh 1 qu'il refte , & qu'il fe marie ; il a de quoi vivre, ainlî qu'il s'arrange. FANFAN. Ma mère, défendez-lui toujours de tn'ennuier d'avantage de fon latin. TULLIUS, gravement j mais d'un ton humilié. Ne craignez rien, Monlîeur, ce qui m'arrive aujourd'hui me dégoûte des leçons , & j'y renonce pour touteTna vie. . JACQUELINE.^ Je vous difpenfe auffi d'écrire des. vers à Poulette. POULETTE. M- Tullius,quececinc vous affli se point, vous aurez votre revanche -, Madame effc à préfcnt chargée de l'éducation de M. Fanfan, attendez feulement le lendemain des noces, bc vous ne ferez pas feul à convenir que dans bien des cas, l'Ecolier en fait plus que le Maître. F I N. PQ 2022 Quêtant, Antoine François L* écolier devenu maître PLEASE DO NOT REMOVE CARDS OR SLIPS FROM THIS POCKET UNIVERSITY OF TORONTO LIBRARY I